L’ancien président de l'Assemblée nationale, Olivier Kamitatu, a révélé dans une tribune ce mardi que la pétition pour le départ de Vital Kamerhe du perchoir de la chambre basse du parlement vise à écarter ce dernier, afin de déclencher le processus de changement de la constitution de 2026, ambition déjà affichée par Félix Tshisekedi fin 2024.
Sur le réseau social X, l’opposant pointe le professeur André Mbata, secrétaire permanent de l’union sacrée, d’être à la manoeuvre du déverrouillage de l’article 220 de la loi fondamentale, qui limite la durée de mandat présidentiel, pour instaurer un septennat et supprimer le poste de premier ministre, et installer un vice-président de la République.
« Le plan, ourdi par le professeur Mbata et sa clique de constitutionnalistes, est prêt. Objectifs annoncés : déverrouiller l'article 220, effacer le poste de Premier ministre, instaurer un mandat présidentiel de sept ans. Le président issu du parti majoritaire serait ensuite secondé par un vice-président. Le ticket est déjà écrit : Tshisekedi et Jean-Pierre Bemba », écrit ce bras droit de Moise Katumbi.
Dans sa lecture, M. Kamitatu présente Vital Kamerhe comme un obstacle à ce projet du régime Tshisekedi. Il entrevoit le retour de Christophe Mboso, 85 ans, à la tête de l’Assemblée nationale pour jouer au catalyseur, les députés pétitionnaires étant des « pions » dans cette initiative.
« Le mécanisme est froid, mécanique, implacable. D'abord, écarter Vital Kamerhe - le dauphin naturel, l'obstacle. Ensuite, faire passer la loi. Christophe Mboso, doyen de l'Assemblée, est chargé de tenir la barre parlementaire et de garantir la docilité des délibérations. Les députés qui aujourd'hui déposent la motion de destitution contre le bureau de l’Assemblée ? Des pions. Aveuglés ou corrompus. Nés d'une mascarade électorale la plus grossière de notre histoire récente, selon beaucoup - ils offrent au pouvoir une majorité fabriquée, non représentative », décrit Kamitatu.
Faisant un parallélisme avec les événements de 2015, « où la nation résistait » et où une poignée démissionnait du pouvoir « pour sauver la loi », Olivier Kamitatu estime que « toucher » la constitution pendant que « la guerre ronge l’Est, l'ethnisme fragmente la nation, la corruption gangrène le corps social… » c'est notamment accélérer la chute, fracturer le social, effondrer l'État.
« (…) Modifier la Loi fondamentale aujourd'hui n'est pas une réforme technique ; c'est un acte politique aux conséquences géopolitiques. C'est graver dans le marbre une prolongation de pouvoir, fermer les marges démocratiques, bâtir un laboratoire de l'auto-suffisance présidentielle. C'est mettre en musique un projet où les institutions deviennent accessoires et le chef d'État, seul juge », a-t-il ajouté, interpellant la responsabilité de ceux qui se taisent.
Fin 2024, alors que l’engagement de changer ou de modifier la constitution était sans faille dans l’union sacrée, le président de la République avait publiquement annoncé qu’il avait le plein droit de modifier ou de changer la constitution. Il avait annoncé la mise en place pour début 2025 d’une commission scientifique mixte devant étudier cette question. Cette ferveur de retoucher la constitution, que le parti au pouvoir attribuait aux étrangers parce qu’« écrite par les étrangers », a été froidie après la prise des villes de Goma et Bukavu par les rebelles de l’AFC/M23, entre janvier et février de l’année en cours.
Samyr LUKOMBO