Avec la prise de Walikale-centre ce mercredi 19 mars, les rebelles du M23 soutenus par l'armée rwandaise viennent de contrôler quatre chefs-lieux des six territoires du Nord-Kivu. Il s'agit de Walikale-centre, chef-lieu de Walikale, Masisi-centre, chef-lieu de Masisi, à l'ouest de Goma, Kibumba, chef-lieu de Nyiragongo et de Rutshuru, chef-lieu du territoire portant le même nom, au Sud de Goma, en direction de Butembo. En plus de ces quatre territoires conquis, la rébellion contrôle également Goma, chef-lieu du Nord-Kivu depuis fin janvier dernier.
Pour l'instant, seuls Lubero-centre, chef-lieu du territoire de Lubero et Oicha, chef-lieu du territoire de Beni demeurent les deux capitales des territoires encore sous contrôle du gouverneur militaire du Nord-Kivu, récemment nommé par Kinshasa en succession du feu Peter Cirimwami, tué au front visant la conquête de Goma. Mais encore que pour Lubero, Kinshasa ne contrôle qu'une partie. Car les rebelles gardent toujours le contrôle de Kanyabayonga à Kitsombiro, une distance de près de 100 Km en direction de Butembo, et sont toujours positionnés à Kitsombiro, près de 30 Km de Lubero-centre, chef-lieu du territoire, leur actuelle cible. Au-delà d'une partie de Lubero et de Beni qu'il partage avec les rebelles des Forces démocratiques alliées (ADF), Kinshasa maintient encore le contrôle des villes de Butembo et de Beni. Beni est l'actuel chef-lieu provisoire de la province du Nord-Kivu.
Des douanes et des mines également occupées par les rebelles
Au-delà des entités, les rebelles contrôlent également des postes douaniers d'Ishasha et Bunagana (Rutshuru) à la frontière avec l'Ouganda et celui de Goma à la frontière avec le Rwanda et Kinshasa ne garde pour l'instant que les postes douaniers de Kasindi et le poste d'entrée de Nobili (Beni), à la frontière avec l'Ouganda. Mais seul Kasindi est plus important en raison du trafic qu'il connaît, Nobili étant l'axe risqué suite à l'insécurité entretenue par les rebelles des ADF sur l'axe Nobili-Kamango-Mbau et son impraticabilité.
Les rebelles du M23 ont également pris contrôle d'importantes zones minières dont celles de Rubaya, la mine de coltan de Masisi. Mais pas seulement, les rebelles du M23 contrôlent également des zones aurifères comme celle de Musigha, dans la région de Bunyatenge (Lubero), contraignant le général autoproclamé Kasereka Kasiyano Kabido, le leader du controversé groupe FPP-AP de les rallier pour "conserver ses intérêts miniers", indiquent des sources locales à ACTUALITE.CD.
Avec ces entités, douanes et mines conquises par les rebelles du M23, le Nord-Kivu est donc privé des recettes. Ce qui affecte le fonctionnement de la province, hypothéquant l'évolution des travaux de construction ainsi que la vie des centaines de fonctionnaires aujourd'hui coincés, sans espoir, dans des hôtels à Beni. Alors qu'il pouvait compter sur Bapere (le secteur qui occupe à lui seul 51% de Lubero), le secteur riche en or et considéré comme le deuxième massif forestier après celui de Walikale, cette entité fait malheureusement face à l'insécurité grandissante. Depuis juin 2024, les rebelles des ADF traquées dans les forêts de Beni ont rejoint le secteur de Bapere et sont en errance dans des villages à cheval entre le secteur et la chefferie voisine de Baswagha (Lubero), et commettent à leur passage des tueries des civils. Des incidents qui ont contraint les creuseurs artisanaux à abandonner leurs importants puits d'or ou des exploitants du bois d'œuvre à abandonner leurs concessions infectées. Ce qui prive l'État, surtout l'état de siège, des recettes.
Claude Sengenya