Les tirs résonnent encore à Goma. Autour de l’aéroport, au centre-ville, à Buhene en périphérie, ou dans des quartiers comme Ndosho et Mugunga, les crépitements ponctuent une journée d’incertitude. Même le bureau du gouverneur n’est pas épargné. Dans ce chaos, une question reste sans réponse : qui contrôle réellement la ville ? « C’est chaotique, la situation est tout sauf claire », souffle une source diplomatique sur place. « Le M23 est là, mais la ville n’est pas complètement entre leurs mains. »
Le Mont Goma, site stratégique abritant l’antenne provinciale de la télévision nationale, est désormais sous leur contrôle. Pourtant, certains militaires congolais n’ont pas déposé les armes et échangent encore des tirs avec les forces du M23 et leurs alliés présumés. D’autres, environ une centaine, ont choisi de se rendre à la base de la MONUSCO.
Hôpitaux ciblés, humanitaires impuissants
Les hôpitaux de Goma sont devenus des cibles collatérales. Charité, CBKA Virunga… ces établissements, situés au centre-ville, ont été touchés par des bombes. À l’hôpital provincial, environ 60 blessés ont été soignés en collaboration avec le Comité international de la Croix-Rouge. Mais l’accès devient de plus en plus difficile. « Nous ne pouvons plus garantir la sécurité de nos équipes face aux tirs croisés », déplore un humanitaire.
Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) a suspendu ses opérations au Nord-Kivu. Une décision qui prive 800 000 personnes d’une aide alimentaire cruciale. « Nous restons sur place avec un personnel réduit, mais nous ne reprendrons les distributions que lorsque les conditions le permettront », assure un porte-parole.
Une ville terrée dans la peur
À Birere, Majengo et autour de l’aéroport, des scènes de pillage ont été signalées. Les bases de certaines ONG sont également infiltrées à la recherche de matériel. Même les humanitaires internationaux, habituellement en première ligne dans cette zone, sont cloîtrés, terrés chez eux.
À la périphérie, des échos de détonations inquiètent. Les habitants de Ndosho et Mugunga décrivent des explosions incessantes. Certains tirs auraient même atteint le territoire rwandais, dans le district de Rubavu, où des bombes ont blessé une dizaine de civils. Le Rwanda, accusé de soutenir le M23, a positionné des chars le long de la frontière, une démonstration de force qui renforce encore l’instabilité.
Le spectre d’une crise humanitaire
Pour les humanitaires, la priorité reste d’atteindre les camps de déplacés, notamment à Kanyaruchinya, et d’évacuer les blessés. « Sans accès humanitaire, les conséquences seront terribles », avertit un travailleur humanitaire. Mais pour l’heure, la paralysie est totale. Les tirs, les pillages et les incertitudes rendent toute intervention impossible.
Goma, déjà fragilisée, bascule un peu plus chaque jour dans le chaos. Une ville qui attend, prise en étau entre la peur et une violence qui semble sans fin.