L'Institut Français de Kinshasa a accueilli, mercredi 25 septembre, une conférence importante sur les industries culturelles créatives en République Démocratique du Congo, animée par le professeur émérite Lye M. Yoka. Cet événement, organisé dans le cadre du cycle anthropologique « Partage des Savoirs », a permis de dresser un diagnostic critique sur l’état actuel de ces industries dans le pays, un secteur offrant diverses opportunités mais confronté également à de nombreux défis.
L'intervention du professeur Yoka a mis en lumière les obstacles que rencontrent les industries créatives congolaises pour se positionner comme des leaders au niveau continental. Il a notamment rappelé l’absence remarquée de la RDC dans le classement des 50 champions des industries créatives en Afrique, publié en février 2024 par l’hebdomadaire Jeune Afrique. Alors que des pays comme le Nigéria, le Sénégal, et la Côte d'Ivoire ont été salués pour leurs avancées notables dans des secteurs tels que la musique, les arts visuels, la mode ou encore le cinéma, la RDC n’a pas été mentionnée.
Yoka a expliqué cette absence par une série de facteurs contraignants : « L’innovation technologique dans les productions artistiques congolaises reste encore en deçà des attentes, et les modèles économiques dans la culture sont souvent trop fragiles pour garantir une chaîne de valeur prospère. »
Il a également pointé du doigt l’inefficacité du cadre légal, notamment en ce qui concerne la protection des droits d'auteur et des droits voisins, un aspect crucial pour attirer des investisseurs et développer un écosystème culturel durable.
Un potentiel culturel sous-exploité
Le diagnostic sévère du professeur Yoka n’a toutefois pas occulté les nombreux atouts de la RDC dans le secteur créatif. La richesse des cultures congolaises et la diversité des expressions artistiques sont des ressources inestimables. Des disciplines comme la musique, les arts visuels, la mode et la danse conservent une grande vitalité au niveau local, bien que leur rayonnement international soit limité par un manque de structuration.
Selon Lye M. Yoka, « les industries créatives congolaises sont riches d’un potentiel énorme, mais elles nécessitent des stratégies de développement plus concertées, ainsi qu'un soutien plus affirmé de la part de l'État et du secteur privé pour se moderniser et se professionnaliser. »
Il a plaidé pour une meilleure articulation entre les artistes, les entreprises créatives, et les pouvoirs publics afin de créer un véritable écosystème interactif, capable de transformer les industries culturelles en levier économique pour le pays.
Un besoin de professionnalisation et d’innovation
Au-delà des constats, cette conférence a également été l’occasion de proposer des pistes pour l’avenir des industries créatives en RDC. Lye M. Yoka a notamment insisté sur la nécessité d’investir dans la formation des artistes et des entrepreneurs culturels pour qu’ils puissent s’adapter aux nouvelles technologies et aux exigences des marchés internationaux. « Les industries culturelles d'aujourd'hui sont globales, et la RDC doit s'ouvrir à ces réseaux pour mieux valoriser ses talents », a-t-il déclaré.
Il a également appelé à des partenariats internationaux plus structurés, notamment avec les pays qui ont su se hisser au sommet des industries culturelles africaines. Des collaborations pourraient, selon lui, dynamiser les échanges de savoir-faire, de financements et d’opportunités pour les créateurs congolais.
La conférence du professeur Lye M. Yoka a été une véritable réflexion critique sur les forces et faiblesses des industries créatives en RDC. En dépit des difficultés, l'événement a été perçu comme un appel à l’action pour mieux organiser et structurer le secteur, afin de permettre à la RDC de tirer pleinement parti de son immense potentiel artistique. La mise en place d’un écosystème culturel intégré et le renforcement des droits d’auteur apparaissent comme des étapes incontournables pour l’avenir des industries culturelles congolaises.
En conclusion, Lye M. Yoka a souligné que « le développement des industries créatives ne sera possible que si toutes les parties prenantes s’engagent avec détermination à relever les défis et à exploiter les opportunités qu’offre la scène culturelle en RDC. » Il a conclu par une phrase marquante : « L’ar (l’argent) appelle l’art. »
James M. Mutuba