Affaire Bukangalonzo : le choix du président Tshisekedi sur les animateurs de la justice  a crucifié l’Etat de Droit (Professeur Dr. Flavien Shirandi, PhD.)

Dr. Flavien Shirandi.,PhD
Dr. Flavien Shirandi.,PhD

Tribune

Acteur politique congolais depuis plusieurs années, technocrate qui a commencé sa carrière dans l’administration et  a gravi les échelons jusqu’à la tête du gouvernement congolais, Augustin Matata Ponyo Mapon a eu un parcours extraordinaire. Premier ministre honoraire et depuis mars 2019 Sénateur de la province du Maniema en République Démocratique du Congo.

Matata Ponyo est accusé depuis 2020 par l'Inspection générale des Finances de détournements de deniers publics (à hauteur de 205 millions de dollars) et d'association de malfaiteurs durant son mandat de premier ministre. Il lui est reproché d'avoir mis en place plusieurs sociétés contrôlées par des proches pour la gestion du parc agro-industriel de Bukanga Lonzo (dans le Bandundu). Le procureur général près la Cour constitutionnelle avait demandé la levée de ses immunités parlementaires alors qu'il est entre-temps devenu sénateur. Le Sénat rejette cette demande le 14 mars 2021 car selon lui c'est au procureur près la Cour de cassation de faire la demande.

Matata Ponyo est jugé devant la Cour constitutionnelle pour détournement de deniers publics dans cette affaire. Mais le 15 novembre 2021, celle-ci s’était déclarée incompétente pour le juger lui ainsi que ses deux coaccusés, le ministre Patrice Kitebi et l'homme d'affaires sud-africain Kristo Groblert.

En juin 2022, un nouveau procès s'ouvre devant la Cour de cassation, mais les trois co-accusés rejettent la compétence de la Cour de cassation. La Cour de cassation avait estimé bon de saisir la Cour constitutionnelle sur le fondement du recours en interprétation des dispositions de l’article 164 de la Constitution sur le juge pénal du Président de la République et du Premier Ministre. Autrement dit, la cour de cassation avait saisi la cour constitutionnelle pour examiner l’exception d’inconstitutionnalité et des questions de constitutionnalité soulevées.

Il s’ensuit que la Cour Constitutionnelle, siégeant en matière d'appréciation de la conformité à la Constitution, d'interprétation et de contrôle de constitutionnalité s'est déclaré contrairement à son premier arrêt de 2021 compétente pour juger un ancien Premier ministre. Il est donc étonnant le changement de position prise par cette cour, alors que la grande partie de sa composition était de la partie lors du premier arrêt. Le Dr Flavien Sirandi, PhD., s’interroge si le changement à la tête de cette juridiction après le premier arrêt, avec le départ du juge président Dieudonné Kaluba et le juge Prince Funga président intérimaire avant lui, écartés le 10 mai 2022 n’est pas à la base de ce changement radical de position. Beaucoup trouvent dans ce changement soudain de position la preuve de la manipulation politique de cette cour.

 

Dans les dispositifs de son arrêt, la cour constitutionnelle a donné les motivations suivantes : l’expression « dans l’exercice des fonctions » telle qu’envisagée à l’article 164 de la constitution signifie qu’il faut que le Président de la République ou le Premier Ministre, ait été en train de procéder à l’un des actes de sa fonction et doit être dans une situation d’exercice effectif des fonctions. Il peut donc être poursuivi pendant son mandat suivant la procédure dérogatoire au droit commun prévue dans la constitution ; l’expression une infraction commise « à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions » telle qu’envisagée à l’article 164 de la constitution signifie que le Président de la République ou le Premier Ministre ait perpétré l’infraction en dehors des fonctions mais en raison des actes professionnels accomplis dans la procédure dérogatoire au droit commun prévue dans la constitution.

Le Président Dieudonné Kamuleta conclue à la lumière de ces argumentaires que:

La Cour constitutionnelle est la seule compétente pour connaître des infractions commises par le Président de la République ou le Premier ministre dans ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions et qu’elle est le juge pénal d'un ancien Président de la République ou d'un Premier ministre qui n'est plus en fonction au moment des poursuites et ce, en parfaite harmonie avec l'esprit du constituant.

De ce qui précède,  le dossier RConst 1816 concernant l'ancien premier ministre Matata Ponyo et consorts, portant sur l'exception d'inconstitutionnalité soulevées d'office par la Cour de Cassation dans la procédure sous RP 08/ CR seront jugés par la Cour Constitutionnelle. Ce qui relance encore le procès  et le débat sur le dossier  Bukanga Lonzo.

En revanche, du côté adversaire, les avocats de Matata estiment que la cour constitutionnelle s’était déjà prononcée sur la question et qu’elle n’allait pas se dédire parce qu’en droit congolais, les décisions de justice ne subissent pas de recours en inconstitutionnalité. Saisie d’un tel recours, la Cour constitutionnelle de la RDC n’a pas d’autre issue de secours que celle de se déclarer incompétente à statuer. 

Les juristes défendant l’ancien premier ministre Matata pensent que  les juges de la Cour constitutionnelle n’ont pas vocation de créer des normes juridiques, car elle s’est déjà prononcée sur son incompétence à juger un ancien Premier ministre. Cela étant, la possibilité d’un revirement juridique ne peut donc être possible. Ils ont évoqué un principe classique de la procédure pénale stipulant « non bis in dem ». Ce qui veut simplement dire que « nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ».

Aussi, ils pensent que la Cour constitutionnelle a statué ultra petita en excédant le cadre de ce qui lui avait été soumis.

Pour eux, la Constitution ne consacre pas du tout l’impunité, mais elle est tout simplement muette quant aux juridictions devant lesquelles des anciens Présidents et Premiers ministres doivent être jugés.

Ils dénoncent également l’irrecevabilité du recours en interprétation, pour défaut de qualité du demandeur parce que la cour de cassation ne faisant pas partie des organes habilités à la saisir en cette matière.

Quant à monsieur Matata Ponyo, tout cela est de l’acharnement politique parce que  le pouvoir en place veut l’empêcher  de postuler  à la présidentielle de 2023, la cour constitutionnelle n’étant pas compétente à le juger.

Face à ces arguments, le Professeur Dr.Flavien Shirandi, PhD., consultant Politique et leadership stratégiste s’interroge pour savoir si  l’ancien premier ministre Matata Ponyo doit-il  échapper à la justice ?, a-t-il droit à un juge naturel ?, si oui ce serait lequel ?

Personne ne semble vouloir juger l’ex-Premier ministre. Pourtant l’article 19 de la Constitution dispose dans ses deux premiers alinéas : « Nul ne peut être ni soustrait ni distrait contre son gré du juge que la loi lui assigné. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable par le juge compétent ».  Rappelle-t-il.

Le Dr.Flavien Shirandi, PhD., souligne que dans cette affaire il y a une violation flagrante du caractère irrévocable de l’arrêt de la cour constitutionnelle consacré par l’article 93 in fine de loi organique numéro 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement  de la cour constitutionnelle qui dispose « les arrêts de la cour ne sont susceptible d’aucun recours, sauf interprétation ou rectification d’erreur matérielle », l’article 95 in fine renchérit que les arrêts de la cour sont obligatoires et s’imposent aux pouvoirs publics, à toutes les autorités administratives, juridictionnelles, civiles, militaires ainsi qu’à tous les particuliers, de ce fait l’arrêt de la cour constitutionnelle du 15 novembre 2021 est irrévocable et susceptible d’aucun recours. Il est donc scandaleux pour une cour qui est au sommet de la hiérarchie judiciaire et dont les décisions sont appelées à faire jurisprudence, de prendre une décision avec autant de légèreté et sous pression politique.   

Le Professeur, Dr.Flavien Shirandi, PhD., pense qu’il est important que ceux qui ont mal géré puissent faire face à la justice car on doit gérer l’argent des contribuables avec des mains tremblantes, cependant pour que l’Etat de droit soit effectif,  la séparation des pouvoirs doit être réelle et la justice doit être indépendante pour mener à bien sa mission de répression. Car la justice pour être efficace doit s’exercer à l’abri de toute intervention injustifiée ou ingérence politique et les décisions de justice ne doivent pas être sujettes à la manipulation politique. Depuis qu’il a fait son retour sur la scène politique sous la bannière de l’opposition, le camp Matata Mapon accuse le pouvoir en place d’instrumentaliser la justice pour écarter les autres candidats dont lui-même de la course à la présidence. Le Consultant Dr. Flavien Shirandi, PhD., s’interroge sur l’opportunité de cette procédure car selon lui la période électorale n’est pas propice pour poursuivre cette procédure car il risquera de biaiser sa régularité pour des intérêts politiques.

C’est sur fond de cette obscurité procédurale que le Dr. Flavien Shirandi, PhD., attire l’attention des congolais sur l’échec de l’Etat de droit prôné par le Président TSHISEKEDI. Ses propres choix sur les animateurs des organes de la justice ont crucifié sa vision sur la justice car les deux juges ont été politiquement désignés par lui-même. Une justice que le président Felix Tshisekedi lui-même lors d’une interview avec son porte-parole Madame Tina Salama avoue que la justice constitue un bémol sur son quinquennat, et qu’il n’était pas satisfait de l’état actuel de la justice car il détruit la nation.      

Plus d’une année après l’ouverture du dossier, c’est une véritable entorse à l’Etat de droit voulu par le président Felix TSHISEKEDI.

Tout en rappelant le déroulement de la procédure jusqu’à ce jour avec l’ouverture du procès ce lundi 21 août 2023, le Dr. Flavien Shirandi PhD.,   craint qu’il ait  de l’acharnement politique  sur l’ancien premier ministre Matata Ponyo, un candidat potentiel à la présidentielle 2023.

Le Chef de l’Etat doit jouer son rôle de Garant du bon fonctionnement des Institutions de la République et du respect de la loi.

La justice élève une nation joue-t-elle son rôle en République Démocratique du Congo ?

Flavien Shirandi PhD