Paul Kagame: « L’accusation selon laquelle j’interviendrais au Congo m’importe peu…L’important est de savoir pourquoi j’interviendrais »

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Paul Kagame, Président du Rwanda/Ph. Droits tiers

Paul Kagame s’est longuement confié sur les tensions entre le Rwanda et la RDC. Dans un entretien accordé au magazine Jeune Afrique, il est revenu sur sa posture vis-à-vis du M23, des FDLR et du gouvernement congolais. Étant donné que cet entretien apporte quelques clés de la compréhension de la façon dont le président Rwandais aborde le sujet, la rédaction a jugé utile de vous proposer quelques extraits. 

« L’accusation selon laquelle j’interviendrais au Congo m’importe peu. Ce n’est ni la première ni la dernière. L’important est de savoir pourquoi j’interviendrais. Si vous ne vous posez pas cette question, vous passez à côté de l’essentiel. Or la réponse est simple : la menace que fait peser sur notre sécurité l’activité d’un groupe imprégné de l’idéologie génocidaire comme les FDLR est clairement susceptible de nous amener à intervenir en territoire congolais, sans excuses ni préavis. Quand vous êtes agressé, vous n’attendez pas les instructions de votre agresseur ou de son protecteur pour savoir comment réagir ».

Il a admis avoir une influence sur le M23: « En ce qui concerne le M23, il peut en effet m’arriver de parler à ses dirigeants. Après tout, ils sont à nos frontières, et les processus de Luanda et de Nairobi, qui recommandent de dialoguer avec tous les groupes armés, y compris celui-là, sont clairs. J’ai donc fait passer des messages d’apaisement au M23, en demandant à ses chefs de cesser le combat et de se retirer de localités qu’ils occupaient. Ce qu’ils ont accepté. Le problème, c’est que l’armée congolaise en a profité pour les attaquer, avant d’être une nouvelle fois défaite ».

Il a également repris l’argumentaire principal qu’il a toujours utilisé: « Les FDLR sont intégrées au sein même des FARDC et c’est bien là que le bât blesse. Cet état de fait ne nous empêche pas pour autant de revendiquer notre droit légitime à aller éteindre l’incendie à sa source, quel que soit l’endroit où celle-ci se trouve, avec ou sans le consentement de qui que ce soit. Jamais le Rwanda n’est intervenu au Congo pour tenter de résoudre une situation qui ne préexistait pas à son intervention et qui ne concernait pas sa propre sécurité ».

Contexte 

Les relations entre Kinshasa et Kigali sont davantage tendues ces dernières semaines. Un avion militaire congolais a été d’ailleurs visé et touché par un tir revendiqué par les autorités rwandaises qui accusaient le Sukhoi de violer son espace aérien. Le M23, soutenu par Kigali, a repris son offensive sur plusieurs axes combattant les FARDC, les milices locales et les Nyatura. La force régionale de l’EAC ne se bat pas non plus se contentant de privilégier la voie du dialogue. Les échanges diplomatiques sont également au point mort. La dernière rencontre prévue à Doha entre les autorités rwandaises et congolaises ne s’est pas n’ont plus déroulée. Les processus de Nairobi et de Luanda n’avancent pas non plus et l’exécution de la feuille de route censée organiser le retrait du M23 et normaliser les relations entre le Rwanda et la RDC est au point mort.