Construction village moderne au Nord-Kivu : au sein de la société civile, ce projet est considéré comme un « piège » pour la RDC

Paul Kagame, président du Rwanda, a décidé de commun accord avec le président de la République, Félix Tshisekedi, de construire un village moderne dans la province du Nord-Kivu, précisément dans les alentours de Goma, en vue de venir en aide aux sinistrés de l'éruption volcanique du Nyiragongo, survenue au mois de mai 2021.

Seulement, l’annonce de ce projet estimé à 30 millions USD, suscite depuis des polémiques allant dans tous les sens. Le débat s’est même déjà invité à l’Assemblée nationale. Pour Jean-Claude Katende, acteur de la société civile et président de l'Association africaine de défense des droits de l'homme (ASADHO), ce projet est un piège tendu par le Rwanda pour la RDC.

« Ce projet est un piège pour la RDC dans la mesure où nous Congolais, nous n'avons pas oublié ce que nous avons subi du Rwanda. Je me rappelle que les autorités congolaises, quand l'incident de Goma est arrivé, avaient sollicité l'appui des partenaires congolais, mais aussi des partenaires internationaux. Si le Rwanda répond à cet appel du président de la République et des autorités congolaises, ce qu'il doit faire, c'est de mettre cet argent à la disposition du gouvernement congolais qui verra dans quelles mesures il va pouvoir l'utiliser pour telle ou telle autre chose. Donc en considération des idées expansionnistes du Rwanda sur le Congo, particulièrement sur la ville de Goma, ainsi que le reste de la province du Nord-Kivu, il est clair qu'un pareil projet ne peut être qu'un piège pour les citoyens congolais, pour notre pays. Je sais que les politiciens seront certainement favorables, parce que moi je n'ai jamais compris la politique du président Tshisekedi vis-à-vis du Rwanda, c'est son choix de faire la politique comme il le fait, mais je pense que beaucoup de Congolais ne sont pas d'accord avec lui. Donc j'estime personnellement que ce village, s'il est construit, risque de ne pas trouver des personnes pour y habiter, parce que ceux qui sont concernés n'ont jamais été consultés pour ça », a déclaré, à ACTUALITE.CD, Jean-Claude Katende.

Le président de l’ASADHO dit, par ailleurs, ne pas comprendre la politique du président de la République, Félix Tshisekedi, vis-à-vis du Rwanda. Il lui reproche notamment le manque de transparence.

« Vous avez suivi dernièrement que le gouvernement avait signé un protocole d'accord sur l'exploitation de l'or avec le Rwanda dans le Maniema. Ce protocole d'accord n'a jamais été rendu public. Le président de la République ne signe pas ces accords en tant qu'individu, il signe en tant que représentant du peuple congolais. Donc si cet accord n'est pas respecté par le Congo, il y aura des incitations non seulement sur le président, mais sur l'ensemble du peuple congolais. Donc, dans le système de transparence qui existe en démocratie, cet accord doit être mis à la disposition des Congolais, mais il ne l'a jamais été. Nous considérons donc qu'il y a des choses qui échappent aux citoyens et ça, ce n'est pas une bonne chose. Il faut aussi dire qu'en ce qui concerne l'insécurité à l'est du Congo, tous nous savons que certains groupes rebelles qui sont impliqués dans la guerre contre la RDC sont soutenus par le Rwanda. Vous savez aussi que l'économie rwandaise vit au dépend de l'économie congolaise. Je vous rappelle que le Congo est le premier producteur du Coltan et le Rwanda le premier exportateur des minerais dont il ne dispose pas, toutes ces questions sont connues (…) », a ajouté M. Katende, qui appelle les Congolais à s’intéresser de près à cette question.

D'après Claude Ibalanky, Coordonnateur du mécanisme du national de suivi de l'accord d'Addis-Abeba ( MNS), ce projet accueillera entre 200 et 400 familles. Mais il n'est pas soutenu par tous. A l’Assemblée nationale notamment, quelques députés ont appelé le gouvernement à refuser ce don.

Gloire Kipoy, stagiaire UCC