L’état de siège lancé depuis environs un mois, met en exergue les militaires et policiers congolais. Qu’est-ce qu’il faut pour la réussite de cette opération ? Que dire des conditions de vie des épouses et autres dépendants des militaires ? Le Desk Femme s’est entretenu ce 01 juin avec Christella Kiakuba Lubanzadio, fille d’un policier et coordonnatrice de Telema Muana Ya Mapinga.
Bonjour Madame Christella Kiakuba, vous êtes initiatrice et coordonnatrice de l’Asbl Telema Muana Ya Mapinga. Qu’est-ce qui vous a motivé à mettre en place cette association ? Comment est-elle organisée ?
Christella Kiakuba : l'association Telema Muana ya Mapinga (TMM) réunit en son sein les dépendants des hommes en uniforme de la République Démocratique du Congo. Nous existons depuis 2013. Ce qui m'a le plus motivé dans cette démarche, c'est la précarité et la promiscuité qui caractérisent notre quotidien dans les camps. Dans le souci d'amener le changement au coeur de ma communauté, nous avons mis en place TMM, avec les autres enfants de militaires et policiers. Nous sommes légalement reconnus par l'état congolais et l'organigramme de l'Asbl place l'Assemblée générale au premier plan ensuite, la coordination exécutive ainsi que les autres organes attitrés.
En ce moment, combien d’enfants de militaires et policiers font partie de votre organisation ? Que proposez-vous comme services aux enfants et autres dépendants des militaires ?
Christella Kiakuba : en termes de chiffres, TMM a un ancrage dans les familles de militaires et policiers compte tenu de son plaidoyer pour l'intérêt général. Ceci explique le flux d'adhésion de plus de 10 000 membres qui ont dûment rempli leurs fiches d'adhésion. En ce qui concerne les services, nous travaillons en termes des projets. Pour les plus jeunes, nous faisons le recensement avant de les inscrire à l'école. Pour ceux qui disposent des diplômes d’Etat mais sans moyens financiers pour aller à l'Université, nous leurs donnons la chance de faire le test d'admission à la bourse Muana ya Mapinga Academia qui offre l'opportunité d'obtenir une licence dans le domaine de leur choix aux frais de l'association. Pour les veuves et épouses des militaires et policiers, elles sont orientées et soutenues dans les petits commerces après des formations sur l'entrepreneuriat et autres thématiques.
Quels étaient vos objectifs de départ et quel bilan dressez-vous actuellement ?
Christella Kiakuba : notre premier objectif est celui de redorer l'image ternie des dépendants de militaires et policiers. Avec le projet de la bourse Academia et tant d'autres que nous avons déjà réalisé, nous pouvons être content du travail abattu et ainsi dire que le bilan est positif. Nous nous considérons comme une structure très active pour la cause des dépendants des militaires et policiers.
Avec la Bourse Muana Ya Mapinga Academia, dans combien de villes êtes-vous actuellement ?
Christella Kiakuba : cette Bourse est un projet phare de l'Asbl. Nous avons actuellement réussi à l’expérimenter dans deux provinces, Kinshasa et le Kwango précisément dans la ville de Kenge. Pour Kinshasa nous comptons 50 candidats et 6 à Kenge, totalement pris en charge par l'Asbl Telema Muana ya Mapinga et ses partenaires.
Quelles difficultés avez-vous rencontrés jusque là?
Christella Kiakuba : les difficultés sont de plusieurs ordres. Nous sommes notamment butés au problème des moyens financiers et de la logistique. Ce qui parfois ne nous permet pas de mener à bien nos actions. L’amélioration des conditions de vie des militaires, des policiers et leurs dépendants passe de façon obligatoire par l'application de la loi portant statut du militaire des FARDC et des personnes de carrière de la police nationale congolaise.
Vous avez récemment lancé une formation des veuves militaires avec Afia Mama. Quels en sont les objectifs ?
Christella Kiakuba : cette formation de trois jours était axée sur la notion de l'entrepreneuriat social. L’ONG Afia MAMA de Mme Anny Modi Tenga nous a accordé le cadre et les formateurs pour former les 15 mamans veuves du camp Mbaki Aéroport et ses annexes. Elles ont acquis les capacités de gestion pour devenir autonome et TELEMA MUANA YA MAPINGA les a toutes doté d'une enveloppe pour lancer des petits commerces. Tout a été sanctionné par la remise d’un brevet qui atteste leur participation à la formation sur l'entrepreneuriat.
En ce moment où les militaires sont mis en exergue à travers l’Etat de siège, quelles peuvent-être vos recommandations ?
Christella Kiakuba : le seul et l'unique moyen efficace de soutenir les militaires c'est appliquer ipso facto la loi portant statut du militaire des FARDC car tout a été réglé dans cette disposition. Un militaire au front devrait mourir avec son butin de guerre et s'assurer que même s'il tombe sur le champ de bataille, la prise en charge de sa famille sera assurée.
Parlez-nous de votre parcours ?
Christella Kiakuba : mon parcours est un miracle. C'est pourquoi j'ai consacré ma vie pour les autres. Je voudrais qu'il y ait beaucoup de Christella dans notre communauté. Je suis fille d’un policier. Avec un solde moyen de 100$, j'ai pu devenir celle que je suis aujourd'hui. Je plaiderai toujours pour l'égalité des chances au sein de ma communauté et ce jusqu'à ma mort.
Un dernier mot ?
Christella Kiakuba : que le président de la République s'implique pour l'application stricte de la loi portant statut du militaire des FARDC et de la police.
Propos recueillis par Prisca Lokale