En matière d'héritage, les filles et les garçons sont loin d'être logés à la même enseigne (baladeur)

Photo/ Actualité.cd
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En République Démocratique du Congo,les filles aînées de familles se trouvent souvent confrontées à des inégalités en matière de succession. Le Desk Femme d’Actualité.cd a rencontré plusieurs d'entre elles  pour comprendre comment elles vivent leur position d'aînée et les défis qu'elles rencontrent en matière d'héritage.

Bénédicte Kikufila 33 ans, mère de 3 enfants, et originaire du Kongo central  se confie.

"En tant qu'aînée, j'ai toujours eu le sentiment d'avoir une responsabilité particulière envers ma famille. J'ai aidé mes parents à élever mes frères et sœurs, et je m'attendais à être reconnue pour cela. Mais lorsqu'il a été question de l'héritage, j'ai vite compris que les choses ne se passeraient pas comme je l'espérais. J’ai grandi en sachant que, quoi qu'il arrive, ce serait mon petit frère qui héritera de la maison familiale. C'est une tradition chez nous. Même si j'ai toujours été très proche de mon père, je n'ai jamais espéré autre chose."

 Chantal, 28 ans, explique que dans sa province d'origine, l'Equateur, "l’héritage est réservé aux garçons. C'est une règle intangible, transmise de génération en génération. La fille n’a pas du tout une place dans la société. Même si j’ai toujours excellé à l’école et que j’ai un bon travail, je ne peux pas espérer avoir les mêmes droits d’héritage que mes frères."

Si certaines femmes acceptent leur sort avec résignation, d'autres expriment leur frustration. "J'ai étudié, j'ai travaillé dur, je pensais avoir gagné ma place dans la famille", raconte Véronique, 38 ans. "Mais au moment de la succession, mes espoirs ont été réduits à néant."

Anastasie Kanku, 28 ans et originaire du Kasaï Oriental partage un sentiment similaire: "Être aînée, c'est à la fois une fierté et une lourde responsabilité. J'ai toujours été considérée comme la deuxième mère de mes frères et sœurs. Mais quand il s'agit de l'héritage, je sens que mes droits ne sont pas les mêmes que ceux d'un garçon. Les coutumes de notre région privilégient les fils. Même si j'ai étudié et que je suis financièrement indépendante, on m'a fait comprendre que l'héritage familial était réservé aux hommes. C'est une injustice que je trouve difficile à accepter".

Face à ces inégalités, certaines femmes se battent pour faire évoluer les mentalités et les lois. "Nous devons continuer à sensibiliser les gens sur l'importance de l'égalité entre les filles et les garçons", affirme Gisèle, 24ans, étudiante en droit. "L'héritage, c'est une question de justice et d'équité. Tous les enfants doivent être traités de la même manière ".

Elle relève nombreux défis auxquels les filles aînées continuent à faire face dans le monde actuel:

- Les coutumes: dans de nombreuses communautés, la coutume veut que l'héritage soit transmis aux fils, les filles étant considérées comme des membres temporaires de la famille
- La pression sociale: les femmes qui osent revendiquer leurs droits à l'héritage sont souvent stigmatisées et marginalisées
- Le manque de connaissance des lois: beaucoup de femmes ne sont pas informées de leurs droits et ne savent pas comment les faire valoir
- Les préjugés : les filles aînées sont souvent perçues comme des épouses pour d'autres familles et non comme des héritières.⁠

Ces témoignages des filles et femmes mettent en lumière une réalité complexe. Si les lois congolaises prévoient l'égalité entre les filles et les garçons en matière d'héritage, les pratiques coutumières et les mentalités restent souvent ancrées dans le passé.


Nancy Clémence Tshimueneka