Le coordonnateur des questions de la jeunesse au sein de la Majorité présidentielle, Adam Chalwe Munkutu, a affirmé, dans une interview accordée à ACTUALITE.CD ce lundi 21 août, que le chef de l'Etat, Joseph Kabila, va respecter la constitution en ce qui concerne le nombre de mandat présidentiel. Adam Chalwe insiste également sur la nécessité pour tous les acteurs de se préparer aux élections et soutient que la question de l'organisation d'un référendum n'est pas à l'ordre du jour au niveau de la MP.
<b>Après deux dialogues en l’espace de deux mois, la RDC demeure dans une profonde crise politique au point que certains cadres de la MP évoquent l’éventualité d’un 3ème dialogue. D’après vous, comment sortir de cette crise politique ?</b>
Il faut commencer par recadrer les choses et préciser les termes. Dire que nous sommes en crise, c'est exagérer sur la gravité de la situation. En tant que politologue, j’ai du mal à y croire parce qu’en sciences politiques, lorsqu’on parle de crise politique, c’est quand il y a paralysie du fonctionnement régulier des institutions politiques. Or dans la situation actuelle, ce n’est pas le cas. Pour plus de précisions, je vous recommanderais de lire Ramazani Shadary sur les inventaires de différentes crises politiques que la RDC a connues. Vous verrez que celle que vous considérez comme étant une crise politique majeure n'en est pas une, en fait.
<b>Alors si la RDC n'est pas en crise pourquoi avoir convoqué le dialogue politique ?</b>
Les raisons majeures qui nous avaient poussés, sous le leadership clairvoyant du président de la République, Joseph Kabila Kabange, à aller au dialogue, c'était pour nous éviter des violences postélectorales. Il ne vous a pas échappé qu'en 2006 et 2011, la proclamation des résultats des élections avait été émaillée des violences meurtrières. En tant que garant de la paix de la RDC et de la sécurité de ses habitants, le président de la République, en toute responsabilité, avait jugé bon de prévenir le fléau des violences postélectorales en convoquant le dialogue. L'autre raison, toujours dans un souci de préserver la paix sociale, qui a emmené le chef de l'Etat à convoquer le dialogue national était dicté par le retard pris dans l'organisation des élections à cause notamment de la guerre budgétivore qui éclata à l'aube de son second mandat (2012). Dans un élan de transparence, il nous fallait donc évoluer ensemble en vue de parachever le processus électoral qui a connu un retard suite au problème financier auquel le pays était confronté après la situation imprévisible à l’Est de la RDC avec la guerre nous imposée injustement par le M23. Dès lors que l’Accord du 18 octobre a bénéficié de l’inclusivité de celui du 31 décembre, un autre dialogue n’est plus à l’ordre du jour. Pour la simple raison que les résolutions pertinentes sont en train d’être appliquées. La preuve, le gouvernement est dirigé non pas par une personnalité de la Majorité présidentielle mais bien par l’un des cadres historiques de l’UDPS. Secrétaire adjoint de l'UDPS et porte-parole du Rassemblement du vivant de feu Etienne Tshisekedi, Bruno Tshibala, est légitime comme figure de proue de l'opposition. À présent, il est à pied d’œuvre. L’autre preuve de la bonne application des accords issus du dialogue c'est le Conseil National de Suivi de l'Accord et du Processus électoral, CNSA. Cette institution est en pleine activité comme prévu par l’accord du 31 décembre 2016. Ainsi donc le cap est résolument mis sur les élections. Bien que le dialogue reste une vertu en démocratie, il est temps de faire parler le peuple. Et la manière la plus efficace et solennelle de son expression demeure les élections.
<b>La priorité des priorités, dites-vous, c’est l’organisation des élections pour mettre fin à la crise, mais le processus électoral est opaque en l’absence d’un calendrier électoral. Comment expliquez-vous cela ?</b>
Le processus électoral n'est pas opaque en l'absence provisoire d'un calendrier. Il se veut plutôt méthodique et rigoureux. D'abord, relever le défi de l'enrôlement de plus de 40 millions d’électeurs et, ensuite, élaboration du calendrier électoral suivi de sa publication. Voilà le schéma. La CENI nous proposera le calendrier après la fin de l’enrôlement des électeurs parce qu’on ne peut pas déterminer la date des scrutins sans électeurs. Le préalable est en train d’être finalisé avec l’enrôlement au Kasaï et au Kasaï Central, 2 provinces secouées par de fortes violences mais heureusement grâce à la fermeté du commandant suprême des FARDC, la paix, indispensable à tout processus électoral, y revient. Nous croyons que, dans un bref délai, le corps électoral sera connu après quoi les députés qui rentrent des vacances parlementaires incessamment pourront voter la loi sur la répartition des sièges. C’est alors seulement qu’il sera possible d’envisager les autres étapes avec certitude et vous dire quand est-ce que nous irons voter.
<b>Le calendrier indicatif des scrutins présidentiel, législatifs et provinciaux, n'est-il pas dans l'Accord avec la date butoir de décembre 2017 ?</b>
À l'impossible nul n'est tenu, dit-on ! Si en décembre 2017, la CENI est dans l'impossibilité d’organiser les élections pour des raisons évidentes, notamment techniques et logistiques, le CNSA et le gouvernement ainsi que l'organisme chargé d'organiser les élections pourront nous dire pourquoi cette date indicative n'a pas été respectée. Toute personne de bonne foi voit bien que l'insécurité dans les Kasaï a fortement retardé le processus. Après, les 3 institutions proposerons une nouvelle date en fonction de paramètres objectifs sécuritaires et financiers, notamment. Mais il faut souligner qu’aller au-delà de décembre 2017 est prévu par l’Accord de la Saint-Sylvestre. Ne pas le dire relève de la pure mauvaise foi. Ainsi donc, il n’y a aucune opacité.
<b>Le processus électoral a pris du retard. Certains opposants estiment que c’est une façon d’empêcher ou retarder l’éventualité redoutée et redoutable de l’alternance politique. Incompétence du Gouvernement ou encore complaisance de l’opposition dans ce retard que tout le monde presque déplore ?</b>
Je venais de le dire, la guerre que nous avons connue à l’Est de la République a englouti le gros de nos moyens, ce qui fait que nous ne pouvions pas en disponibiliser assez pour faire face aux dépenses électorales. D’où d’ailleurs la question d’envisager le système électoral le moins coûteux possible au regard des moyens à mobiliser. Les élections ne doivent pas nous coûter une fortune au point de nous priver des ressources indispensables à notre développement. A ce sujet, le constitutionnaliste français de renommée internationale, Maurice Duverger, n’a-t-il pas raison lorsqu’il dit que la démocratie a du mal à s’appliquer dans un environnement d’extrême pauvreté. D’où l’impératif de réfléchir sur comment minimiser au maximum le coût des élections. Y réfléchir n'est pas un déni de démocratie car, sous le leadership du président Kabila, la démocratie a été consolidée avec 2 élections générales en 10 ans. Donc la question du retard calendaire est tributaire de la fin de l’opération d’enrôlement des électeurs qui conditionne la loi de répartition des sièges. Il est impensable de faire le contraire, car comment aller aux élections sans l’espace Kasaïen. La date est prévue par l’Accord du 31 décembre 2017 et les mécanismes de prolongation également. Il s’agit de décembre 2017 et en cas d’impossibilité, il est prévu la tripartite entre le Gouvernement, la CENI et le CNSA. Donc laissons la tâche aux institutions de la République de nous organiser de bonnes élections au lieu de mettre la charrue devant le bœuf, car il ne sera pas en mesure de la traîner. Je ne suis pas là pour accuser tel ou tel autre. Nous rejeter la balle ne servira à rien. Soyons constructifs et avançons. Nous n’avons aucune crainte s'agissant de l’alternance d’autant plus que nous nous y préparons sérieusement et que si alternance il y a - alternance comme succession, ça sera à l’interne et non le contraire. Le cas de l’ANC peut nous servir d’école.
<b>La MP semble vraiment croire aux élections. C'est ce qui explique la multiplication des descentes sur le terrain. A-t-elle des chances réelles de conserver démocratiquement le pouvoir ?</b>
Oui, nous disons que nous avons des chances réelles parce que nous sommes dans le peuple et avec le peuple, nous ne pouvons pas envisager les élections et les perdre, c’est un non-sens en politique : par impossible défaite surprise, on sera sportif. Nous pourrions également assumer notre échec ; mais de la manière dont nous nous préparons, nous sommes sûrs de gagner. Pendant que les autres se pavanent dans les salons occidentaux pour conquérir le pouvoir, nous, nous sommes sur terrain, notre foi reste dans ce peuple qui est conscient de ce que nous faisons et envisageons de faire pour son bien-être ultime. Les élections ne se gagnent pas sans préparation. Il faut se faire connaître et comprendre les problèmes de votre électorat afin de bien élaborer un programme qui tient compte de ses attentes
<b>Joseph KABILA est-il près de quitter le pouvoir conformément aux prescrits de la constitution ou continue-t-il à imaginer des scénarios pour pérenniser son bail au Palais de la Nation ?</b>
Non, mais Joseph Kabila l’a dit et redit et nous continuons à le répéter qu’il respectera la Constitution, du premier au dernier article. Je m’étonne qu’on puisse revenir là-dessus alors que nous savons qu’aucune institution de la République, y compris le Président de la République, n’est au-dessus de la Constitution. Lui poser ou me poser cette question, c’est le pousser à se mettre au-dessus de la Constitution. La Constitution est claire, je crois que nous sommes tous tenus de nous soumettre, sinon on mettrait depuis très longtemps une autre Constitution en place pouvant nous permettre d’aller dans ce sens
<b>Qu’en est-il de la question du Référendum ? Pensez-vous que le peuple est prêt à consommer cette pilule amère ?</b>
Le référendum est prévu dans la Constitution en son article 5 alinéa 1 et 3. Si on peut y recourir, on n’aurait violé aucune disposition de la loi fondamentale. Je crois qu’on parle de référendum lorsqu’il y a des questions qui sollicitent des réponses précises directement de la population. A ce que je sache, au niveau de la MP, cette question n’est pas à l’ordre du jour et je me trouve dans l’impossibilité de vous répondre. Tenter d'y répondre risquerait de s'apparenter à une discussion sur les sexes des anges. Sur le supposé caractère amer de la question, comment cela peut-il devenir pilule amère alors que ce n’est qu’une manière de faire parler le peuple, c’est son droit constitutionnel.
<strong>Stanys Bujakera</strong>