Sam Bokolombe : Élections nécessaires, car l’alternance s’impose - (Tribune)

<em>Le député national Sam Bokolombe revient sur la crise politique que connaît la République démocratique du Congo. Dans une tribune envoyée ce mercredi 28 juin 2017 à ACTUALITE.CD, cet élu, aussi professeur d’université, retrace la genèse de cette impasse politique et rappelle la nécessité de la ténue des élections dans le délai.</em>
<h2><strong>Élections nécessaires, car l’alternance s’impose</strong></h2>
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Dans une démocratie constitutionnelle, un pouvoir responsable organise sa succession. Mais, la kabilie a refusé de se conformer aux prescriptions constitutionnelles quant à ce. Les différents dialogues ne semblent pas avoir eu raison de son obstination à conserver indûment le pouvoir. Alors qu'elle s'est moquée, à raison, des conclusions de la Cité de l'UA dont certains ténors en étaient des alliés intimes, que dis-je, des acolytes, elle a eu tort de ne pas savoir saisir l'aubaine inespérée que constituait pour elle l'Accord de la Saint-Sylvestre pour faire amende honorable aux yeux du peuple. Perfide, elle a craché sur cet instrument politico-juridique de sortie de crise, non seulement en le falsifiant, mais aussi et surtout en s'en détournant éperdument par la nomination d'un gouvernement manifestement mis en place pour ne résoudre aucun problème, mais plutôt pour davantage en créer. D'où, l'exacerbation d'une impasse politique qui n'avait aucun lieu d'être si le droit et la bonne foi avaient prévalu, laquelle impasse est le fait exclusif de J. Kabila et ses affidés.

Aujourd'hui, tout va en vrille dans un pays qui a vocation à la grandeur, à la dignité, à la prospérité et dont légitimement le peuple n'aspire qu'au bonheur. Sans verser dans le catastrophisme qu'à tort on nous colle, c'est un euphémisme que de dire que le pays va très mal à tous égards, notamment politique, social et économique. En guise d'illustration, il suffit de lire le dernier constat objectif fait par la CENCO, lequel lui a attiré l'ire de Kabila et l'humiliation des princes de l'église, notamment à Lubumbashi où certains se seraient fait tancer comme des gamins. Irrespect absolu! Le pays se trouve comme dans un décor de barils de pétrole qui n'attend qu'une étincelle pour exploser. Et, cela peut résulter d'une intention ou d'une bête négligence.

Confondant république et monarchie, la kabilie a erronément misé sur le temps, qui n'est l'allié de personne, pour différer délibérément la tenue de scrutins en vue d'émousser et espérer venir à bout de la volonté d'alternance démocratique du peuple congolais. Rien n'y est fait, la procrastination ne profite toujours pas. Aujourd'hui, elle doit se mordre le doigt. Tous les subterfuges politiciens temporisateurs et arguties juridiques dilatoires semblent montrer leurs limites face à un peuple, déterminé à dresser son front "encore courbé", selon l'expression de la CENCO, afin de prendre son destin en mains. Son seuil de résilience, et donc du supportable, est largement dépassé. Rien, mais alors plus rien, n'est susceptible d'en contenir la décision, ni les tueries, ni les enlèvements, ni les arrestations arbitraires, ni les tracasseries administratives, ni les fosses communes qui essaiment l'espace kasaïen, ni les attaques armées de Beni, ni les menaces contre tout ce qui bouge... Au demeurant, il entend se servir de toutes ces infortunes comme carburant et ressort de ses actions de délivrance.

Aussi, surmotivé et vent debout, le peuple congolais a-t-il en point de mire les élections qu'il tient absolument à obtenir au 31 décembre 2017, conformément à l'Accord de la Saint-Sylvestre. Car, pour ne pas vider la République de son contenu, il faut qu'elles se tiennent, ces élections, en vue du renouvellement, bien que tardif, mais impérieux, des mandats politiques, du reste, obtenus par certains de la manière que l'on sait. Ce seront des élections ou rien, n'en déplaise au Président J. Kabila qui y verrait une tentative de "vouloir créer le désordre" de la part de ceux qui le martèlent. Non, c'est le contraire qui causerait le désordre. Il n'y a pas d'alternative à la tenue de scrutins à cette échéance. Il s'agit d'avoir des dirigeants qui soient à la fois légitimes et légaux. Ce pays n'étant la propriété privée de personne, il ne saurait être géré comme un butin de guerre ou une boutique. Dire même que dans ce dernier cas, la réglementation prévoit de s'acquitter d'une patente.

Et s'il n'y avait pas d'élections au 31 décembre 2017 comme tout semble le laisser entrevoir au travers des chicaneries de la centrale électorale, officine stratégique du pouvoir ?

Cette hypothèse vraisemblable, mais non conforme à la Constitution et à l'Accord de la Saint-Sylvestre, à ce jour non encore mis en œuvre, donnerait lieu à une impasse institutionnelle sauvage, faute de moindre passerelle juridique. Un cas de figure pire que celui du 19 décembre 2016, parce que le pouvoir aura fait fi des engagements conclus par la classe politique pour la gestion institutionnelle nécessaire et consensuelle de la transition politique, c'est-à-dire de l'extra time constitutionnel. On n'abuse pas du temps additionnel. Et, temps additionnel sur temps additionnel ne vaut. Dès lors, personne ne pourra revendiquer ni légitimité, ni légalité pour gouverner notre pays.

En effet, le pouvoir qui aura épuisé toutes ses ressources, tant juridiques que politiques, devra en tirer toutes les conséquences. Pour être séquentiel, la première conséquence et, du reste, l'essentielle qui est préconisée est bel et bien la démission de J. Kabila et la mise en place d'un gouvernement dirigé par l'Opposition, la vraie, l'authentique, en charge exclusif d'organiser les scrutins. S'il se braque, alors il basculerait résolument dans le fait et consommerait le coup d'Etat tant redouté. Telle attitude fonderait définitivement le peuple à faire application de son arme fatale, par ailleurs constitutionnelle, qu'est l'article 64 alinéa 1 et ce, suivant les modalités qu'il jugerait opportunes. Signalons qu'à dessein, le Constituant de 2006 n'avait pas voulu assortir cette pertinente et salutaire disposition d'un mode d'emploi spécifique, car c'est laissé à la discrétion du peuple souverain. Ainsi donc, tout peut arriver, car il est inadmissible qu'une minorité égoïste, incure, par surcroît cynique de compatriotes prive indéfiniment la majorité du peuple, en souffrance, des potentiels bienfaits d'une alternance démocratique, c'est-à-dire en termes simples, d'un changement d'air, d'hommes et de méthodes.