L’actualité de la semaine vue par Thérèse Ntumba

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Thérèse Ntumba

Du retrait du Rwanda de la CEEAC à la rencontre entre Félix Tshisekedi et Martin Fayulu en passant par la classification de la RDC parmi les destinations dangereuses pour les  citoyens américains; la semaine qui vient de s’achever a été riche en actualités. Retour sur chacun des faits marquants avec Thérèse Ntumba.

Bonjour madame Thérèse Ntumba et merci de nous accorder de votre temps. Pouvez-vous nous parler brièvement de vous ?

Thérèse Ntumba : je suis cadre dans une entreprise, spécialisée dans l'e-money, actrice socio-politique et licenciée en math-infos de l'Unikin.

Le Rwanda a été écarté de la présidence tournante de la CEEAC en raison de son soutien au M23/AFC. Comment percevez-vous cette décision ?

Thérèse Ntumba : Cette décision est juste et conforme au principe de cohérence diplomatique. On ne peut pas confier la présidence d’une organisation régionale à un pays accusé d’agression contre un autre État membre. Le Rwanda, en soutenant activement les rebelles du M23/AFC, mine la stabilité régionale. Son exclusion est donc une mesure de protection collective et une reconnaissance implicite du droit de la RDC à vivre en paix.

Le Rwanda a réagi en se retirant de la CEEAC, accusant la RDC de manipulation. Quel impact ce retrait pourrait-il avoir sur la coopération régionale et les efforts de stabilisation de l’Est de la RDC ?

Thérèse Ntumba : Le retrait du Rwanda complique les mécanismes régionaux de dialogue, mais il lève aussi une forme d’ambiguïté. La coopération entre États reste possible, mais elle doit reposer sur la confiance et la transparence. En se mettant de lui-même en marge, le Rwanda confirme son isolement diplomatique. Cela peut libérer la CEEAC pour qu’elle travaille plus efficacement avec les États réellement engagés pour la paix.

Martin Fayulu a récemment été reçu par le président Tshisekedi pour discuter du pacte social pour la paix initié par la CENCO et l’ECC. Comment jugez-vous cette initiative, et pensez-vous qu’elle peut réellement favoriser une cohésion nationale dans un contexte d’agression extérieure ?

Thérèse Ntumba : C’est une avancée significative. Le dialogue politique entre pouvoir et opposition est indispensable en période de crise. Le fait que Martin Fayulu et le président Tshisekedi se rencontrent pour parler d’un pacte social montre une volonté d’unir les forces congolaises face à l’agression. La cohésion nationale ne peut être imposée par le haut, mais si les élites politiques s’accordent sur des priorités communes, cela donne un signal fort à la population.

Quelle est la place, selon vous, des organisations religieuses comme la CENCO et l’ECC dans le processus de pacification et de consolidation démocratique ?

Thérèse Ntumba : La CENCO et l’ECC sont des piliers de la conscience nationale. Elles ont toujours su jouer un rôle de médiation crédible. Dans un pays où les institutions sont souvent affaiblies, ces organisations offrent un espace d’éthique et de dialogue. Leur proposition de pacte social est pertinente, car elles parlent au nom du peuple, au-delà des clivages politiques. Leur rôle est irremplaçable dans la quête d’une paix durable.

Quels sont, selon vous, les trois leviers prioritaires à activer pour sortir la RDC de la spirale de la guerre et renforcer sa souveraineté régionale et internationale ?

Thérèse Ntumba : Premièrement, renforcer l’armée nationale pour qu’elle puisse défendre efficacement le territoire. Deuxièmement, instaurer une diplomatie cohérente et offensive pour isoler les États agresseurs. Troisièmement, mobiliser la population autour d’un projet de société commun : éducation, emploi, justice. Sans cohésion interne, même la meilleure stratégie internationale reste fragile.

Les États-Unis classent la RDC parmi les destinations dangereuses pour leurs citoyens. En tant que membre de la société civile, quel message souhaitez-vous adresser à la communauté internationale sur la réalité du terrain et les besoins urgents du peuple congolais ?

Thérèse Ntumba : Le danger est réel, mais il est le fruit d’une guerre imposée à notre pays. Nous attendons de la communauté internationale non pas des jugements unilatéraux, mais un accompagnement responsable. Le peuple congolais aspire à la paix, à l’éducation, à la santé. Il est temps de renforcer les partenariats, pas de nous isoler davantage. Les sanctions doivent viser les agresseurs, pas les victimes.

Les tensions entre Donald Trump et Elon Musk autour de la politique budgétaire ont fait la une. Pensez-vous que les querelles politiques dans les grandes puissances influencent ou déteignent, d’une manière ou d’une autre, sur les dynamiques politiques en Afrique centrale ?

Thérèse Ntumba : Oui, dans la mesure où elles révèlent une instabilité idéologique qui affecte la cohérence des politiques étrangères. Quand les États-Unis changent d’orientation sur l’environnement, la technologie ou la sécurité, cela a des répercussions jusqu’en Afrique. Le soutien à la RDC peut devenir incertain selon le climat politique à Washington. Nous devons en tirer une leçon : notre souveraineté ne peut dépendre des humeurs des puissants.

Propos recueillis par Nancy Clémence Tshimueneka