De violents combats entre les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et les rebelles du M23 soutenus par Kigali, autour de Lubero (Nord-Kivu), ont considérablement détérioré la situation sécuritaire et humanitaire dans cette région de la RDC.
Lors de la 26e réunion du Conseil des ministres, la Première ministre Judith Suminwa Tuluka a dénoncé cette situation qui aggrave les conditions sociales et sanitaires des personnes déplacées dans l'est du pays.
"Les conditions sociales et sanitaires s'aggravent avec l'afflux de personnes déplacées, principalement des femmes, des enfants et des personnes âgées en provenance des villages de Kaseghe, Alimbongo, Ndoluma et Kitshombiro. Ces déplacés, qui ont quitté leurs foyers en hâte sans emporter d’effets personnels, manquent cruellement de tout et ont besoin d'une assistance urgente. Bien que certains aient trouvé refuge chez des familles d'accueil, la majorité se retrouve dans des églises, des hangars, des marchés et des écoles. Dans ce contexte, la Première ministre a souligné que les conditions de vie deviennent de plus en plus difficiles en raison de l'accès limité aux soins de santé, les infrastructures sanitaires locales étant saturées", a-t-elle déploré.
Face à cette situation critique, Judith Suminwa a donné des instructions fermes au gouvernement.
"En prolongement des instructions du Président de la République formulées lors de la 25e réunion du Conseil des ministres, elle a demandé au Vice-Premier ministre, ministre de l'Intérieur, ainsi qu'à la ministre des Affaires sociales, d'intégrer la situation alarmante de Lubero dans le plan d'urgence pour la gestion des crises et des catastrophes en cours d'élaboration. Elle a insisté pour que toutes les mesures nécessaires soient prises afin de renforcer les capacités d'intervention des structures d'alerte et de réponse aux catastrophes humanitaires, notamment celle de la Caisse de solidarité nationale et de gestion humanitaire des catastrophes, en leur fournissant les ressources matérielles et financières indispensables", précise le compte rendu de la réunion.
Le gouvernement a été chargé de présenter, dans un délai de quinze jours, un plan d’urgence pour la gestion des crises et des catastrophes humanitaires couvrant les trois prochains mois. Cette instruction découle des orientations données par le Président Félix-Antoine Tshisekedi lors de la 25e réunion du Conseil des ministres, tenue le vendredi 6 décembre 2024.
Contexte humanitaire préoccupant
La violence et l'instabilité, combinées à un manque cruel de services de base, affectent les populations de la RDC depuis des décennies. Les provinces orientales, en particulier, continuent de subir une insécurité persistante et des conflits récurrents. En 2024, plus de 25 millions de personnes, soit un quart de la population, auront besoin d’une aide d’urgence, et environ 40 % de la population est confrontée à des niveaux sévères d’insécurité alimentaire aiguë (IPC 3 ou plus).
Selon un bulletin de l’OCHA, l’Est de la RDC, notamment le Nord-Kivu, a connu des niveaux de déplacement sans précédent en raison de l’intensification des conflits violents. Depuis août 2023, le nombre de personnes déplacées a presque triplé, atteignant plus de 1,6 million. Les femmes et les enfants représentent 75 % de ces déplacés. À Goma, par exemple, le nombre de ménages déplacés en 2024 est supérieur de 70 % à celui de 2023.
Un contexte politique et sécuritaire tendu
La situation sécuritaire dans le Nord-Kivu reste critique. Les rebelles du M23, soutenus par Kigali, poursuivent leurs offensives malgré l’accord de cessez-le-feu signé par les parties prenantes. Pendant ce temps, Kinshasa continue de rejeter tout dialogue direct avec ces groupes armés, exacerbant l’impasse politique. Le processus de Luanda, censé ramener la paix dans la région, peine à produire les résultats escomptés. Les États-Unis et d'autres partenaires internationaux exhortent les parties à intensifier leurs efforts pour éviter une escalade et saisir les opportunités de paix.
Clément Muamba