Kinshasa : retour sur le Fickin 11, une édition plus courte et remplie d’innovations

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Fickin 11

La ville de Kinshasa a vibré au rythme du cinéma, à travers la huitième édition du Festival International de Cinéma de Kinshasa (Fickin). Elle s’est tenue du 3 au 6 octobre dernier à l’Institut Français de Kinshasa et l’académie des beaux-arts. Plus de 5000 personnes ont pris part à ces festivités entre projections de films, rencontres professionnelles, ateliers et bien d’autres activités connexes.

Dans cette ambiance cinématographique, le directeur du festival, Kevin Mavakala s’est confié à ACTUALITÉ.CD. Dans cet entretien, il parle de la directrice de cette édition, les rencontres Kongo panoramique et des opportunités qui sont liées à cette grande manifestation pour les jeunes cinéastes. 

ACTUALITÉ.CD : Bonjour Kevin Mavakala ! Dans quel état d’esprit vous avez lancé cette onzième édition  du festival de Cinéma de Kinshasa ? 

Kevin Mavakala : Dans l’état d’esprit de quelqu’un qui est déterminé et en même temps heureux de porter cette responsabilité parce qu’on a des comptes à rendre aux cinéastes, au public et ce qui est vrai, ce n’est pas la porte d’à côté, mais avoir cet honneur de porter cette responsabilité, c’est dans cet état d’esprit que je suis.

Vous présidez pour la deuxième fois ce festival de cinéma à Kinshasa, qu’avez-vous amélioré par rapport à l’année passée ? 

Je ne parlerai pas d’amélioration, je parlerai plutôt de faire avec ce qu’on a. L’année passée, par exemple, on était sur huit jours, cette année on est sur quatre jours. L’année passée, on avait plusieurs sites, cette année on est réduit. Chaque année est un concept qu'on apprécie et chaque année a sa philosophie et la philosophie de cette année c’est de ramener tout le monde au même endroit pour partager cette vision du cinéma, cette pensée du cinéma ensemble pour que ça n’échappe pas à qui que ce soit voilà. 

Alors que l’année passée, le concept était de faire en sorte qu’il ait un lien, un contact entre les cinéastes et les acteurs d’autres secteurs d’activités culturels ou artistiques, mais cette année particulièrement il y a cette idée de ramener tout le monde au même endroit pour partager ensemble l’expérience, cette vision et cette pensée du cinéma.

Est-ce que tu peux rassurer que partir de huit à quatre jours ce n’est pas un aveu d’un échec ou d’une incapacité à pouvoir tenir pendant longtemps ce festival ?

Tout dépend de la qualité de ce que vous présentez. Il y a des activités qui se tiennent en une journée et vous avez une très belle expérience plus que quelque chose d’un mois. Nous l’équipe de direction de cette année, on a pensé que pour réussir le concept qu’on a pour cette édition, il faut aller sur quatre jours, être sur place, si c’est deux endroits on est ici et là et on s’arrête là et en soi ce n’est pas d’abord sur le plan organisationnel mais c’est en termes du concept et de la vision de l’édition.

Réunir les gens notamment pour faire des rencontres Kongo panoramiques pour échanger et discuter. Pourquoi Kongo Panoramique ? 

Kongo panoramique, à la base, c’est une plateforme qui a été créée par des jeunes auteurs issus des ateliers de l’idéofilm du festival FICKIN, pour eux c’est qu’après Fickin il n’y a pas de rencontre, il n’y a pas de table ronde pour réfléchir autour du cinéma, comment est-ce qu’on pourra faire avancer ce cinéma ?

D’où, ces jeunes ont créé Kongo panoramique, dont je fais partie. On s’est dit pourquoi pas créer un cadre qui, même s’il n’y a pas Fickin, nous pouvons commencer à inviter des gens pour discuter autour du cinéma, réfléchir ensemble et c’est toujours un honneur d’accueillir Kongo panoramique dans Fickin afin d’organiser différentes rencontres professionnelles.

C’est quoi la genèse de Kongo panoramique ?

Kongo panoramique existait depuis 2019, on a organisé des rencontres professionnelles. On a organisé pas mal de rencontres, mais ça fait un temps qu’on n’avait pas stoppé mais pris un bon de temps parce qu’il a fallu réajuster les choses, il a fallu repenser aussi le concept, on s’est relancé l’année passée et on continue.

Parmi les discussions sur lesquelles vous vous basez, vous avez parlé notamment des opportunités offertes par un festival de cinéma, quelles sont ces opportunités là que vous offrez au Fickin ? 

C’est simple, on ramène des professionnels du 7ième art, on les met ensemble avec ceux qui veulent apprendre le cinéma. On te met ensemble avec quelqu’un qui a la solution à ton problème, voilà c’est une opportunité, c’est une passe en or qu'en tant qu’apprenti cinéaste ou celui qui a un projet de film ou de cinéma ne peut que saisir. 

Est-ce qu’on peut dire que ces jeunes à qui on a donné ces opportunités n’en ont pas profité véritablement pendant dix ans ?

Pas forcément pendant 10 ans parce que moi j’en ai profité. Voilà moi je suis le fruit de différents festivals de cinéma.

C’est un cas isolé.

Ça dépend de vision, d’où l’importance de la conversation qu’on a eu parce qu’on s’est rendu compte que chaque année, il y a des jeunes qui viennent dans les ateliers de formations, il y a des gens qui viennent participer au festival, il n’y a pas un résultat, mais le résultat c’est la personne. Est-ce que cette personne-là est consciente que les résultats doivent venir de lui-même ?

Donc, vous appelez au sens de la responsabilité des participants aux ateliers et aux rencontres panoramiques pour pouvoir s’auto former aussi.

Exactement, au-delà de se former et de s’auto former, c’est aussi avoir une vision bien précise de ce que tu veux faire pour ta carrière cinématographique et se battre pour la réussite de cette vision et le festival ne peut que t’aider par rapport aux différentes personnes qui viennent.

Vous avez aussi posé la question de comment donner de la valeur aux certificats reçus. Comment on donne de la valeur aux certificats que l’on reçoit après des formations dans le cadre des festivals de cinéma ? 

C’est simple, en participant dans des projets de film je précise. Donc, plusieurs projets, que ce soit le vôtre ou pas, mais aussi en créant un réseau avec ceux avec qui vous avez appris ensembles. Un réseau des gens qui peuvent avancer ensemble et proposer des projets, mais aussi au-delà de ça, les différents formateurs qui ont quand même une vision assez particulière du cinéma parce qu’ils sont déjà avancés.

Il faut créer des liens aussi avec eux, des liens avec des projets parce que ce qui peut nous réunir au cinéma ce n’est que le projet. Le cinéma existe grâce aux projets, un film existe parce qu’il y a deux ou trois personnes qui se sont réunies et se sont mis d’accord pour avancer ensemble, porter une idée afin de lui donner vie que les gens vont voir à l’écran. 

Donc, c’est cette opportunité là aussi que le festival offre grâce aux ateliers et il faut juste être conscient de ça. Lorsque tu as un certificat, il faut savoir comment l’exploiter. Il y a certaines personnes qui pensent qu’un certificat tu le laisses à la maison et puis tu dis après les ateliers, ils ne nous ont pas donné des opportunités, est-ce qu’en soi c’est le rôle du festival ?

Le rôle du festival c’est de te présenter ces gens-là qui t’ont donné ce certificat, qu’est-ce que toi tu fais de ce certificat ? Tu l’utilises, utilise cette connaissance que tu as acquise dans certains projets.

Participer à des projets, oui. Comment réagissez-vous quand on sait que parfois le choix des participants à des projets est fait selon les affinités ? 

Je ne pense pas, surtout en termes techniques. S’il y’a un projet de film et que toi tu viens pour travailler, tu dis que je veux travailler, qu’on me paie ou pas, je serai là, je vais parfois assister telle ou telle personne, personne ne va te chasser, surtout s’ils savent qu’ils ne vont pas te payer. Et toi, ton objectif ce n’est pas qu’ils te paient, toi tu veux valoriser ce que tu as appris, tu veux mettre en pratique ce que tu as appris.

Parce que si tu le mets en pratique toi aussi un jour tu vas faire un projet et là tu seras payé si tu portes un vrai projet ou soit après avoir mis en pratique ce que tu as appris par rapport aux autres projets dans lesquels tu as participé ça te donne un background pour que tu t’engages plus tard. 

Et vous dites aussi qu’il ne faut pas être pressé d’imposer un certain salaire quand on est au début de sa carrière ? 

Il faut juste savoir faire la part des choses, tu ne connais rien, tu viens chez moi mais tu veux que je te paie pour la connaissance que je vais te donner. Franchement parce qu’il faut qu’on se le dise, aux États Unis, après avoir fini tes études de cinéma, on ne te donne pas un projet directement pour le réaliser parce que ça peut te prendre 10 ans. 

C’est-à-dire, le temps de participer dans des projets des autres, d’apprendre même si on va te payer mais c’est l’expertise. Tu as fais l’université et c’est encore une autre dimension mais je sais que je n’aurai rien, mais toi, par rapport à ton expertise, je te paierai et je sais que tu as beaucoup à gagner par rapport à ce que moi je fais pourquoi tu veux que je te paie. 

Il y a un autre volet de cette initiative des rencontres Kongo panoramique avec l’Ambassade de France et les opportunités qu’elle offre. De quoi il s’agit exactement ?

Dans la plupart du temps, la plupart d’entre nos compatriotes disent « Circuit nabino boko bomba yango kakabino moko » et consort. C’est peut-être par manque d’informations, nous en tant que festival on s’est dit pourquoi ne pas faciliter cette information aux autres. L’Ambassade de France a un attaché audiovisuel et tout ce qui a trait à l’audiovisuel, il y a des projets en commun qui peuvent se faire entre la RDC et la France ou l’accompagnement de la France par le biais de son Ambassade. 

Il y a un chargé de l’audiovisuel qui va faire près d’une année ici en RDC. Ils ne veulent pas que des cinéastes, même les journalistes, tous ceux qui sont dans l’audiovisuel ont des opportunités qu’ils peuvent avoir dans l’Ambassade de France.

En bref, avec ces rencontres panoramiques, qu’est-ce que vous attendez à court terme ?

Ce que j’attends à court terme, c’est simple : il faut faire des projets et aller jusqu’au bout.

Lire aussi : Fickin : Kongo panoramique, le rendez-vous d’échanges et d’opportunités des créateurs (Podcast avec Kevin Mavakala)

Propos recueillis par Kuzamba Mbuangu