En plein cœur de la commune de Lingwala, le rond-point "Etienne Tshisekedi", anciennement connu sous le nom d'Ex-huilerie, devient le théâtre d'une scène désolante. Aux heures brûlantes de midi, une foule de passagers attendant les taxis, des commerçants affairés et des changeurs de monnaie se retrouvent plongés dans une atmosphère étouffante, saturée d'une odeur nauséabonde provenant d'un amas de détritus qui gisent là depuis plusieurs semaines. Ce tableau sombre se répète, sous le regard impuissant des autorités urbaines, au grand désarroi de la population, craignant la propagation de maladies respiratoires et d'autres affections liées à la saleté.
Un jeune changeur de monnaie, préférant garder l'anonymat, explique comment ce rond-point est devenu une décharge publique. "Des déchets s'accumulaient ici avant d'être évacués par les éboueurs de la commune. Cependant, cela fait un bon moment qu'ils ne sont plus venus, et nous ignorons la raison. Chaque jour, les gens continuent de jeter des déchets, contribuant ainsi à accroître cet amoncellement", témoigne-t-il.
La majeure partie de ces ordures provient des commerçants et d'autres individus, notamment des enfants des rues, qui ont transformé ce lieu en un endroit de dépôt d'ordures, selon un jeune cireur de chaussures.
"Ici, toutes les vendeuses jettent leurs déchets. Il arrive même que des passants urinent en plein jour. Quant aux enfants des rues, ils y laissent leurs déjections, surtout la nuit", rapporte-t-il.
Erick, chauffeur de taxi communément appelé "Ketch" et âgé d'une quarantaine d'années, témoigne des difficultés qu'il endure en attendant le nombre maximum de passagers en direction de Bandal-Tshibangu. "Parfois, j'attends jusqu'à 20 minutes avant de partir de l'arrêt. Pendant tout ce temps, mes clients et moi devons endurer cette odeur, risquant d'être asphyxiés", déplore-t-il.
Il en appelle aux autorités pour redoubler d'efforts afin de débarrasser cet endroit de toutes ces immondices, préoccupé par le risque de propagation de maladies au sein de la population. "Nos autorités agissent comme si elles n'avaient jamais mis les pieds ici. Pourtant, elles sont bien conscientes de cette décharge publique. Nous espérons qu'elle sera évacuée au plus vite pour nous préserver des maladies", implore-t-il.
Le 19 octobre 2020, Gentiny Ngobila Mbaka, gouverneur de la ville de Kinshasa, avait lancé un vaste programme d'assainissement baptisé "Kin Bopeto", en présence du président Félix Tshisekedi. Ce programme, financé à hauteur de plus de 350 millions de dollars américains sur une période de 5 ans, visait à évacuer les déchets, dont la production quotidienne est estimée à près de 10 mille tonnes à Kinshasa, dont deux mille tonnes de déchets plastiques destinés à être recyclés. Malheureusement, ce programme semble rejoindre la longue liste des projets inachevés, selon plusieurs observateurs.
Par Bruno Nsaka