RDC: des otages des ADF se sont enfuis, l'armée ougandaise continue de se renforcer

Illustration. La ville de Beni (Nord-Kivu)/Ph. ACTUALITE.CD

L'armée congolaise a annoncé vendredi que les bombardements déclenchés mardi depuis l'Ouganda contre les ADF avaient permis à 27 otages de s'enfuir de bases rebelles dans l'est de la RDC, où les troupes ougandaises continuent de se renforcer.

Le ministère ougandais de la Défense a précisé que l'opération lancée mardi avait pour nom de code "Shujja" ("celui qui est fort", en swahili) et visait essentiellement quatre sites identifiés comme des bases des ADF (Forces démocratiques alliées).

Les opérations "dans le territoire de Beni (Nord-Kivu) ont permis à 27 citoyens kidnappés par les ADF d'échapper à leurs bourreaux", a déclaré Antony Mualushayi, porte-parole des Forces armées de RDC (FARDC) dans la zone, qui a diffusé une photo de ces anciens otages, prise dans un camp de l'armée à une dizaine de km de Beni.

"Vers 3 heures du matin, un drone est passé au-dessus de nous", a raconté en swahili l'un d'eux, Paluku Makombozi, à la radio de l'armée FARDC-FM. Les ADF "nous ont dit d'éteindre le feu... Et vers 06H00, nous avons entendu les bombes, boum, boum!". 

Il dit avoir entendu un rebelle déclarer à un de ses chefs: "c'est Museveni qui nous bombarde". Après, "nous nous sommes dispersés et gloire à Dieu! Nous avons eu la chance de retrouver le chemin jusqu'au camp militaire".

Paluku Makombozi, qui se présente comme un cultivateur de Komanda, dans la province voisine de l'Ituri, a ajouté qu'il était dans son champ quand les ADF, "des musulmans", l'avaient kidnappé.

Selemani Hassan, chauffeur tanzanien, a expliqué avoir été pris en otage le 5 novembre, sur la route de Komanda. Il y a eu des tirs, des hommes "qui ont crié +Allah akbar+" et l'ont emmené avec d'autres otages en brousse. "Ils ont essayé de nous convaincre d'intégrer l'islam", a poursuivi le chauffeur.

Quand l'Ouganda a déclenché l'opération contre les ADF, "nous avons entendu des tirs (...) puis aperçu des drones, et les bombardements ont commencé", a-t-il encore raconté. "Ils se sont dispersés, et moi aussi j'ai pris la fuite". 

- Protéger les civils - Joséphine Mateso a précisé quant à elle avoir passé deux mois et demi en brousse avec les ADF: "j'étais dans un camp de femmes, la cheffe nous disait que son voeu est que tout le monde soit musulman; ils nous utilisaient pour leurs travaux des champs". Elle aussi a évoqué le passage de drones, les bombardements, les rebelles qui s'enfuient...

Les ADF, à l'origine des rebelles ougandais hostiles au président Yoweri Museveni, sont implantés depuis 1995 dans l'est de la RDC, où ils sont considérés comme responsables du massacre de milliers de civils. L'Ouganda les accuse de son côté d'être responsables de récents attentats sur son sol revendiqués par l'organisation jihadiste Etat islamique, qui présente les ADF comme sa "province d'Afrique centrale".

L'opération militaire en cours se poursuit avec des opérations de fouilles au sol. 

Un témoin au poste-frontière de Nobili (Nord-Kivu) a fait état à l'AFP vendredi du passage d'une quatrième colonne de troupes ougandaises en quatre jours, avec camions et chars légers, se dirigeant vers leur base avancée au village de Mukakati, à 13 km.

L'Ouganda déploie infanterie, artillerie, forces blindées et spéciales, a précisé sur son site internet le ministère ougandais de la Défense, ajoutant que l'opération était commandée côté ougandais par le général Kayanja Muhanga. 

"Elle va s'employer principalement à affaiblir des camps ennemis identifiés à Yayuwa, Tondoli, Beni 1 et Beni 2", ajoute-t-il. Selon le général Muhanga, elle fera l'objet d'une évaluation stratégique tous les deux mois. Aucun bilan n'a été fourni à ce stade, bien que le site du ministère évoque sans autre précision "des milliers de victimes" parmi les ADF.

De son côté, Amnesty International a appelé toutes les parties à "assurer la protection des civils et respecter la loi humanitaire internationale". "Par le passé, des interventions militaires étrangères, y compris ougandaises, ont fini par viser des civils", constate dans un communiqué Sarah Jackson, directrice adjointe régionale d'Amnesty.

AFP et ACTUALITE.CD