CHRONIQUE LITTERAIRE DU PROF YOKA « Vous  avez dit ‘couvre-feu’ ?   Vraiment ? »

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Confidences du chauffeur du Ministre

Il  n’en  revient pas, mon patron le ministre des Affaires Stratégiques et Tactiques ; il  n’en  revient   pas  de  constater que le couvre-feu n’est devenu qu’un … couvre-fête nocturne. Et maintenant que mon ex- ministre (ministre désormais en …minuscule) est,  selon  lui, «  en réserve de la république », il a quelque peu délié sa langue. Par exemple il  n’a pas assez de mots poivrés pour dénoncer le fait qu’à travers la capitale, notamment dans nos quartiers d’en bas, s’agissant du couvre-feu, c’est, comme disent les Kinois, « défi contre défi » (« tembe na tembe »), c’est  « tiya motu ba-kata » (« je mets ma tête à couper à tout prix ») :  les   bars  sont  bondés hors limite, et la clientèle sans masque ni distanciation sanitaires ; même lorsque, par hasard,  un peloton de police surgit, croyez-vous que cette clientèle se disperse ? Non, au contraire, elle se justifie : pour elle il n’y a pas transgression du couvre-feu parce que tout se passe dans le noir et la discrétion ; il n’y a pas couvre-fête parce que tout se  passe sans musique.

Et donc à la santé  du couvre-feu et du couvre-fête ! A la santé des ambianceurs   et des cuiteurs impertinents et hors-la-loi ! A la santé des  ex-futurs ministres déliés  de toute censure, et se trémoussant eux aussi, à  l’ombre du couvre-feu et  à l’ivresse  du couvre-fête sans foi ni loi…

Et puis, le contournement du couvre-feu par le couvre-fête hors-horaire   et  hors-la-loi, n’est –ce  pas  une façon du contournement des embouteillages   monstres de ces derniers jours ! Et donc, à la santé des  bouchons de bière de notre nganda-bar du quartier ; à la santé des bouchons de rues inextricables !

… En effet, aucune avenue, aucune rue, aucune ruelle, aucun tunnel de la capitale n’est épargné par  les embouteillages et les bouchons: bouchons   de véhicules plus que jamais  «  esprits de mort » ;  bouchons de  motocyclistes  « wewa »   plus  que jamais « slalomeurs » ;  bouchons de piétons plus que jamais victimes collatérales…

Et donc à la santé des bouchons de rues !  Avec des « shégués », enfants terribles de rue, convertis en « agents de l’ordre de la circulation » !   A la santé des « shégués » !

… Hier soir, mon patron de ministre   s’est trouvé ainsi pris dans le piège des bouchons de rues, à la sortie des bouchons … de bière de notre nganda-bar du quartier … Trois heures de bouchons ; trois heures de supplice ; trois heures de sommeils par intermittences dans notre véhicule prisonnier des embouteillages ; trois  heures sans pause-pipi…

(YOKA Lye)

03-03-2021