UNIKIN : une année après, les étudiants déguerpis des homes gardent toujours des souvenirs tragiques 

Photo ACTUALITE.CD.

Cela fait exactement une année jour pour jour depuis que les étudiants de l’Université de Kinshasa locataires des homes avaient été déguerpis suite à une décision du ministre de l’Enseignement Supérieur et Universitaire (ESU), Thomas Luhaka, après des manifestations pour réclamer la baisse des frais académiques. Ces revendications avaient coûté la vie à au moins 2 policiers. Dans un délai de 48h, soit entre le 8 et le 9 janvier 2020, les étudiants étaient appelés à libérer le site universitaire. 

Contactés par ACTUALITE.CD, quelques étudiants victimes de déguerpissement conservent toujours les souvenirs d’une période sombre.

‘‘ Ce sont des moments que personne n’aimerait revivre. C’était vraiment comme une période de guerre. On n’était pas vraiment nous, on avait presque perdu conscience, on avait passé des nuits blanches, les Kuluna s’étaient infiltrés parmi les étudiants… Personne ne s’attendait à libérer les homes, c’était difficile de pouvoir déplacer les affaires par manque d’argent. C’est au deuxième jour de ce déguerpissement que nous avons pris conscience en voyant certains garçons passer des nuits dans les homes des filles parce que les policiers s’étaient introduits dans leurs chambres. Il y a eu des vols au home 150 et quelques tentatives de viol. Il y avait des coups de balles et de gaz lacrymogènes qui arrivaient jusque dans les chambres ’’, se souvient Nadège Kamulangu, étudiante à la faculté des lettres.

A Chadrack Kitelo de poursuivre :

‘‘ Il y a eu beaucoup d’atrocités, beaucoup de pertes de biens matériels, quelques embrouilles avec les camarades du home. Nous étions vraiment dans l’agitation. Moi, j’étais à la maison (à la cité) quand l’ultimatum a été donné par le ministre, à la houlette et sans discussion. C’était une situation triste parce qu’on a vraiment perdu beaucoup de biens. C’était aussi triste parce que la décision devait être négociée entre la commission de l’Université et le ministre mais cela n’a pas été fait ’’. 

Il estime également que dans les homes, le danger d’être à nouveau déguerpi est permanent. 

‘‘ Je suis vraiment dégouté, ce sont des souvenirs que je n’aimerais plus revivre. Il y a toujours des atrocités quand les étudiants réclament sur le site universitaire. Ça reste un danger d’habiter les homes aujourd’hui et d’être déguerpi quand le gouvernement voudra. On habite le home par contrat, je trouve que ce n’est plus de la démocratie quand on ne respecte pas cette clause d’une année que les étudiants paient. Ça inquiète que nous ne soyons pas considérés et qu’on puisse nous faire ce qu’on veut et à tous les coups ’’, a ajouté Chadrack Kitelo. 

Le Ministre de l’ESU, Thomas Luhaka avait demandé, dans un communiqué, aux autorités compétentes de la Police Nationale Congolaise (PNC), des services de sécurité et de la justice, de procéder, le plus rapidement possible, à l’identification et à l’arrestation des auteurs des violences et de ces troubles du 06 et 07 janvier 2020 “pour qu’ils subissent la plus grande rigueur de la loi”. 

Le ministre avait également lancé, depuis le 10 février 2020, les travaux de rénovation desdits homes qui restent jusqu’ici inhabités. La réhabilitation n'a pas été à ces jours été faite dans sa totalité. Les homes plateau, ceux des filles et le home 10 sont déjà retouchés tandis que dans les homes 20 et 30 les travaux n’ont jamais commencé. Le 10 août dernier, le Président de la République, Félix Tshisekedi avait visité les bâtiments déjà réhabilités.

Emmanuel Kuzamba