De la clôture du séminaire gouvernemental en RDC, au démenti du gouvernement à propos du dialogue entre Kinshasa et les groupes armés opérant dans l’Est, en passant par la publication progressive des résultats de l’Exetat 2024, la semaine qui vient de s’achever a été riche en actualités. Retour sur chacun des faits marquants avec Marie Jeanne DEBESE.
Madame Marie Jeanne DEBESE, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Marie Jeanne DEBESE: Je suis licenciée en gestion des entreprises, ressources humaines et relations professionnelles, entrepreneure et responsable d’une entreprise de nettoyage et membre de la fondation FEMAR.
Dans un message du Chef de l’Etat, les membres du gouvernement ont été appelés à sceller le pacte d’engagement citoyen pour la cohésion et la solidarité de leur équipe. Comment interprétez-vous cet appel à un pacte d'engagement citoyen ?
Marie Jeanne DEBESE: Étant donné que le gouvernement a un seul programme sur lequel plusieurs ministres vont travailler chacun dans son secteur pour sa matérialisation, les membres du gouvernement doivent travailler en collaboration pour réussir. Cette collaboration les appelle à une cohésion pour éviter les critiques entre eux. Ceci les amènera davantage à s’impliquer davantage aux problèmes des Congolais afin de trouver des solutions adéquates.
Quelles peuvent être les conditions nécessaires pour que cet engagement soit effectif ?
Marie Jeanne DEBESE: Les conditions peuvent être : le patriotisme, l'intégrité de la compétence, la confiance de la population en tablant sur les priorités sociales.
Pensez-vous que ce séminaire contribuera à renforcer la cohésion gouvernementale et à améliorer la gouvernance ? Si oui, comment concrètement ?
Marie Jeanne DEBESE: Non, je ne le pense pas. Étant donné que dans le gouvernement passé, les membres s'étaient distingués par le détournement de fonds publics, le clientélisme, le monnayage des projets et l'attribution contre loi des marchés publics. Et ce sont presque les mêmes membres dans l’actuel gouvernement, ils ne pourront rien changer.
Le Porte-parole du Gouvernement Patrick Muyaya a fait une mise au point après la publication d’un document qui circule sur la toile faisant état d’un prétendu dialogue entre Kinshasa et les terroristes du M23/RDF, à Kampala, capitale de l’Ouganda. Comment interprétez-vous le démenti du gouvernement concernant cet éventuel dialogue ?
Marie Jeanne DEBESE: Si cette nouvelle se confirme, ça va encore discréditer l'État congolais. Pourquoi accepter la voie diplomatique aujourd’hui, au moment où beaucoup de Congolais ont péri dans cette guerre. Au départ, les autorités congolaises avaient refusé cette voie passive. Ces discussions vont nous rendre encore très faibles et fragiles.
Les États-Unis viennent de sanctionner plusieurs personnalités impliquées dans le conflit dans l'Est de la RDC. Comment ces sanctions pourraient-elles influencer la dynamique du conflit dans l'Est ?
Marie Jeanne DEBESE: Je ne suis pas persuadée. Les sanctions américaines et européennes à l'égard de la RDC gagneraient en efficacité si elles étaient davantage ciblées. En se concentrant uniquement sur des exécutants mineurs, elles laissent dans l'ombre les véritables instigateurs de la violence armée. Pour établir une paix durable en RDC, il est impératif de s'attaquer aux racines du problème et de sanctionner les responsables ultimes (le Rwanda et l’Ouganda)
Quelles sont, selon vous, les limites de ces sanctions et quels autres leviers pourraient être utilisés pour pacifier la région ?
Marie Jeanne DEBESE: Les limites de ces sanctions se situent au niveau où elles ne touchent pas les vrais commanditaires de la crise. Les États-Unis et l'Union européenne devraient revoir leur stratégie de sanctions en RDC. En épargnant les véritables commanditaires des violences, ils manquent une opportunité cruciale de promouvoir la paix. Pour une résolution durable du conflit, il est indispensable de cibler les acteurs clés qui alimentent l'insécurité. Cependant, la vraie paix ne pourra être trouvée que si les forces de défense et de sécurité de la RDC arrivent à imposer par dissuasion la paix sur toute l'étendue de la République.
Début de la publication progressive des résultats de l’examen d’Etat édition 2024. Dans un message datant du 24 juillet, Odia Musungay, inspecteur général à l’éducation nationale et nouvelle citoyenneté, estime que les élèves filles finalistes du secondaire ont été plus performantes que les garçons. Quelles peuvent être les implications de ces résultats sur la perception de l'éducation des filles en RDC ?
Marie Jeanne DEBESE: L'annonce de la meilleure performance des filles à l'examen d'État 2024 en RDC est une nouvelle encourageante qui pourrait avoir des implications profondes sur la perception de l'éducation des filles dans le pays. Voici quelques-unes des conséquences potentielles :
1. le renforcement de la confiance en soi des filles
2. Les résultats pourraient contribuer à déconstruire les stéréotypes de genre qui limitent souvent les opportunités des filles
3. L'incitation à l'investissement dans l'éducation des filles
4. La participation accrue des filles à la vie économique et sociale. Il est important de noter que ces résultats positifs ne signifient pas que l'égalité des genres dans l'éducation est atteinte en RDC. De nombreux défis persistent et les femmes doivent continuer à se battre pour parvenir à une véritable égalité des chances.
Comment maintenir et renforcer cette dynamique positive pour les filles ?
Marie Jeanne DEBESE: les résultats de l'examen d'État 2024 sont une excellente nouvelle qui devrait encourager tous les acteurs à poursuivre leurs efforts pour promouvoir l'éducation des filles en RDC. Il est essentiel de maintenir cette dynamique positive et de mettre en place des politiques publiques ambitieuses pour garantir à toutes les filles l'accès à une éducation de qualité afin qu'elles puissent réaliser leur plein potentiel et de ce fait il faudrait : - Encourager les filles à choisir des filières scientifiques - Lutter contre les mariages précoces et les grossesses en milieu scolaires - Former les enseignants à l'égalité des genres - investir dans la promotion de l'éducation de la jeune fille.
Selon une note du ministère de la justice, Constant Mutamba interdit la juxtaposition des associations confessionnelles dans un rayon de 500 mètres. Comment interprétez-vous cette nouvelle réglementation ?
Marie Jeanne DEBESE: Cette mesure me semble bonne et viserait à préserver l'ordre public et la quiétude de la population. Cependant, elle soulève plusieurs questions et pourrait avoir des implications importantes : - elle risque d'être perçue comme une atteinte à la liberté de culte, un droit fondamental garanti par de nombreuses constitutions. Si cette réglementation s'applique de manière sélective à certaines confessions, elle pourrait être considérée comme discriminatoire. Il serait utile de déterminer avec précision le rayon de 500 mètres et identifier les associations confessionnelles concernées pourrait poser des difficultés pratiques.
Quelles peuvent en être les conséquences pour les communautés religieuses selon vous ?
Marie Jeanne DEBESE: Cette mesure pourrait avoir des conséquences importantes pour les communautés religieuses, notamment en termes d'accès aux lieux de culte et de pratique religieuse.
Le gouvernorat de Kinshasa annonce pour bientôt l’opération coup de poing dans la ville pour lutter contre l’insalubrité. Comment impliquer la population dans cette opération et assurer un suivi à long terme ?
Marie Jeanne DEBESE: L'implication de la population dans une opération coup de poing contre l'insalubrité à Kinshasa est cruciale pour assurer son succès à court terme et sa pérennité à long terme. Voici quelques stratégies possibles : - Campagnes d'information intensives à travers les médias (radio, télévision, affiches, réseaux sociaux) pour expliquer les enjeux de l'insalubrité, les objectifs de l'opération et les comportements à adopter. - Organisation d'ateliers de sensibilisation dans les quartiers, les écoles, les églises et les lieux publics. - Impliquer les chefs de quartier, les leaders communautaires, les artistes, les sportifs et les influenceurs pour véhiculer les messages de sensibilisation et encourager leurs communautés à participer.
Le gouvernement nigérian a approuvé l’augmentation de 25 à 35 % des salaires des fonctionnaires. Les pensions des retraités ont aussi été revalorisées. L’annonce a été faite mardi, la veille de la fête du Travail. Ceci pourrait être envisageable en RDC selon vous ?
Marie Jeanne DEBESE: L'augmentation des salaires des fonctionnaires et la revalorisation des pensions des retraités, comme récemment approuvé par le gouvernement nigérian, pourraient être envisagées en République Démocratique du Congo (RDC) sous certaines conditions. Voici quelques facteurs à considérer :
- Une augmentation des salaires pourrait potentiellement stimuler la demande intérieure et améliorer le pouvoir d'achat des fonctionnaires. Cependant, il faut également veiller à ce que cela n'entraîne pas une inflation excessive, qui pourrait annuler les bénéfices de l'augmentation des salaires.
- Si la RDC connaît une croissance économique soutenue, une telle mesure pourrait être justifiée comme moyen de redistribuer les bénéfices de la croissance. Cependant, si l'économie est stagnante ou en récession, cela pourrait être plus difficile à appliquer.
- Une décision de cette nature nécessiterait un large soutien politique et social. Cela inclut non seulement les fonctionnaires et les retraités, mais aussi d'autres groupes de la société qui pourraient réclamer des augmentations similaires.
Une attaque a eu lieu dans le nord du Togo, le week-end dernier. Elle s'est déroulée près de la frontière avec le Burkina Faso et a été revendiquée par le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (JNIM). Comment cette attaque pourrait-elle impacter les relations entre le Togo et ses voisins ?
Marie Jeanne DEBESE: L'attaque perpétrée dans le nord du Togo, revendiquée par le JNIM, a des implications potentiellement profondes sur les relations du pays avec ses voisins, notamment le Burkina Faso. Elle souligne l'importance de renforcer la coopération régionale pour lutter contre le terrorisme au Sahel. Les pays de la région doivent adopter une approche globale qui combine des mesures sécuritaires, des politiques de développement et des initiatives de dialogue interreligieux.
Quelles sont les perspectives d'une intensification de la lutte contre le terrorisme dans la région ?
Marie Jeanne DEBESE: L'intensification de la violence pourrait avoir des conséquences néfastes sur le tourisme dans la région. En effet, les touristes auront du mal à fréquenter les zones en proie à l'insécurité.
Après s'être retiré de la course à la présidence des États-Unis, le président Joe Biden a soutenu la vice-présidente Kamala Harris pour le remplacer. Quelles pourraient être les implications de cette décision pour la dynamique politique à l'approche des élections ?
Marie Jeanne DEBESE: La décision de Joe Biden de se retirer de la course à la présidence et de soutenir Kamala Harris pourrait avoir plusieurs implications pour la dynamique politique à l'approche des élections : - Ce soutien pourrait aider à unifier le parti démocrate autour d'un candidat unique, réduisant ainsi les divisions internes et les luttes intestines. Cela pourrait renforcer la position de Harris et améliorer ses chances contre les candidats républicains.
Joe Biden pourrait transférer une partie de sa popularité et de sa base électorale à Harris. Les électeurs qui soutiennent Biden pourraient être plus enclins à soutenir Harris grâce à cette approbation
Selon vous, quels sont les défis majeurs que Kamala Harris pourrait rencontrer en tant que candidate, et comment Biden pourrait-il continuer à la soutenir ?
Marie Jeanne DEBESE: Kamala Harris pourrait rencontrer plusieurs défis majeurs, notamment :
- En tant que femme asiatique, elle pourrait être la cible d'attaques raciales et sexistes. De plus, son passé en tant que procureure générale de Californie pourrait être scruté et critiqué par ses opposants.
- Assurer l'unité du parti sera crucial. Certains progressistes peuvent ne pas être entièrement satisfaits de ses positions passées et présentes, ce qui pourrait créer des divisions internes.
- Elle devra trouver des moyens efficaces pour mobiliser les jeunes électeurs, les minorités et les groupes de soutien de base du Parti Démocrate pour assurer une participation électorale élevée.
Pour soutenir Kamala Harris, Joe Biden pourrait :
- continuer à faire l'éloge de son travail et de ses compétences dans des discours publics, des interviews et des événements.
- Participer à des événements de campagne avec elle, montrant ainsi une forte alliance et solidarité.
Propos recueillis par Nancy Clémence Tshimueneka