Kinshasa : le combat quotidien des aides ménagères pour une vie digne

Photo/ Actualité.cd
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Kinshasa, la capitale congolaise est une ville aux contrastes saisissants. Derrière les portes des maisons cossues, se cache une réalité souvent méconnue : celle des aides ménagères, piliers invisibles d'une partie de la société. Rencontre avec Jolie Meta, une femme de 45 ans, qui consacre une grande partie de son temps à entretenir la maison d’une famille aisée.

Chaque matin, à l'aube, Jolie quitte sa modeste maison située à Mont Ngafula, pour se rendre chez ses employeurs à Lemba. Son emploi du temps est chargé : nettoyage, cuisine, lessive, vaisselle, repassage… Elle jongle entre les différentes tâches, toujours avec sourire. "Je me lève à 5 heures du matin pour préparer le petit-déjeuner de mes enfants avant de partir travailler. J’enchaîne les ménages jusqu’en fin de journée. C’est un travail dur, mais il faut que ma famille vive", confie-t-elle.

Pourtant, derrière cette apparente sérénité, se cachent des difficultés. 
Cet emploi, souvent informel, expose Jolie à une grande précarité. Son revenu est faible, les horaires irréguliers et ses droits sociaux quasi inexistants. Elle n’a pas de contrat de travail, ni de protection en cas de maladie ou d'accident. Ce qui la rend vulnérable. "Je suis souvent exploitée", déplore-t-elle. "Les horaires sont longs, les tâches nombreuses, les salaires souvent faibles, et les heures supplémentaires ne sont même pas payées. Parfois, je travaille tard le soir, et je n’ai pas beaucoup de temps pour ma famille," explique-t-elle.

Le travail domestique à Kinshasa est profondément marqué par les inégalités sociales. Cette femmes est souvent considérée comme subalterne, chargée de toutes les tâches ménagères et familiales. Elle subit parfois des discriminations, et des violences verbales. Ses compétences ne sont pas reconnues à leur juste valeur, et ses  aspirations professionnelles sont souvent limitées.


Jolie  a déjà été confrontée à des situations délicates.
"Les employeurs ne voient en moi  qu’une domestique. Ils ne prennent pas toujours en compte mes  difficultés. C’est un véritable défi de concilier ma vie professionnelle et ma vie familiale. Souvent, je me sens tiraillée entre les deux. Et ça m’épuise. Quand je suis malade, je n’ai pas le choix : je dois travailler, sinon je risque de perdre mon emploi. On me demande de faire toujours plus avec moins". Ce qui l’expose également à des risques pour sa santé notamment les troubles musculo-squelettiques liés aux travaux répétitifs.

Les discriminations sont également fréquentes. Jolie est parfois confrontée à des remarques désobligeantes, à des harcèlements ou à des conditions de travail dégradantes. "Parfois, je me sens comme une servante, avoue-t-elle. Mais je n’ai pas le choix, j’ai besoin de cet emploi pour survivre."

Un impact environnemental méconnu

Les défis auxquels fait face cette aide ménagère ne se limitent pas aux aspects sociaux et économiques. Elle est également au cœur des problématiques environnementales. En effet, elle utilise quotidiennement des produits ménagers souvent nocifs pour la santé et l'environnement. De plus, elle est souvent confrontée à un manque d'accès à l'eau potable et à des infrastructures sanitaires adéquates.

"Je travaille dur tous les jours, mais je n'ai pas de sécurité. J'aimerais pouvoir envoyer mes enfants à l'école et avoir un toit digne de ce nom. Je rêve d'un monde où les femmes comme moi sont respectées et valorisées."

Le quotidien de Jolie est celui de milliers de femmes à Kinshasa. 


Nancy Clémence Tshimueneka