Est de la RDC: le Cardinal Ambongo pointe notamment la mauvaise gouvernance des congolais eux-mêmes et les combinaisons d'intérêts économiques se servant des pays voisins à la base de l'instabilité 

Carte des limites de la RDC et ses voisins

En République démocratique du Congo, l’Eglise catholique s’exprime régulièrement sur les questions vitales qui touchent la nation. Comme lors de ses nombreuses prises de parole devant les fidèles au cours des célébrations eucharistiques, le Cardinal Fridolin Ambongo est revenu récemment sur la situation sécuritaire que traverse le pays dans sa partie orientale secouée par des groupes armés nationaux et étrangers dont le M23, une rébellion appuyée par le Rwanda. Mais l'archevêque métropolitain de Kinshasa estime que la responsabilité dans cette sites Congolais ont une grande part de responsabilité dans la situation de l'Est suite à la mauvaise gouvernance et l'absence de l'intérêt général au profit des intérêts personnels.

"Quand je vois le sort de mon pays, le sort de mon peuple, je pense tout de suite à l'expérience de cet homme arrêté par des bandits, tabassé, roué des coups et abandonné aux bords de la route et tout le monde passe à côté mais on le regarde et puis on tourne le regard jusqu'à ce que c'est soit un samaritain qui est venu à son aide. Donc la RDC est aujourd'hui dans cette situation là mais la cause principale c'est ce que j'avais dit je vois sur deux plans. Premièrement, il y a une cause interne ce qu'on appelle la mauvaise gouvernance de la part des Congolais eux-mêmes parce qu'on peut se demander pourquoi cela n'arrive qu'au Congo et pas ailleurs?", a-t-il indiqué au cours d'un entretien diffusé sur KTO, une chaîne de télévision catholique de langue française dimanche 17 mars 2024

Et de poursuivre :

"La remise en question par nous-mêmes de notre manière de gérer notre pays. Et malheureusement depuis l'indépendance jusqu'aujourd'hui, on a l'impression que l'homme congolais, la personne humaine congolaise n'a jamais été au cœur des préoccupations de nos dirigeants. Tous ceux qui arrivent au pouvoir mettent l'accent tout de suite sur leurs intérêts personnels, l'intérêt de leur groupe et l'intérêt de la population ça ne les intéresse pas. Ça, c'est la première responsabilité, je trouve que c'est la cause principale de tous les malheurs du Congo, l'irresponsabilité du peuple congolais particulièrement de ses dirigeants".

Outre l'implication ou la responsabilité première des nationaux,  l'archevêque de Kinshasa a évoqué également l'influence des forces "obscures" et "extérieures" qui empêchent la stabilité dans la partie Est de la RDC.

"L'autre raison, l'autre cause c'est une sorte des combinaisons d'intérêts économiques, des grandes compagnies pétrolières, forestières, minières qui veulent opérer au Congo mais en se servant parfois des pays voisins, d'où toute la colère actuelle au Congo vis-à-vis du Rwanda. Si je prends la province du Katanga, l'essentiel des mines du Katanga sont aujourd'hui entre les mains des chinois parce que l'occident à un certain moment s'est retiré au nom de ce qu'on a appelé à l'époque l'Afro pessimisme, l'occident s'est retiré mais les chinois sont venus, ils ont tout pris. Pour eux, les conditions humaines, les conditions politiques, ils ne s'intéressent pas à ça, seulement prendre les minerais et partir avec et ils viennent même avec des chinois qui travaillent dans des mines", a souligné le cardinal Fridolin Ambongo.

Et d'ajouter :

"L'Est du pays qui n'est pas tout à fait entre les mains des chinois est devenu aujourd'hui une zone qui n'est contrôlée par personne, c'est comme un trou noir et ce trou noir, ce désordre est entretenu parce que c'est là qu'il y a beaucoup de minerais qu'on appelle minerais stratégiques. Nous étions vraiment choqués de voir que l'Union Européenne a signé un accord avec le Rwanda sur les minerais stratégiques qui se trouvent au Congo et là, ça a beaucoup choqué les Congolais même si derrière cet accord il y avait la volonté de veiller à la traçabilité de ces minerais mais la perception du point de vue du Congo c'était comme si l'occident veut créer le désordre à l'Est et en profiter pour exploiter les minerais stratégiques en partant du Rwanda".

La République Démocratique du Congo dans sa partie Est fait face à l'activisme des groupes armés étrangers et locaux. À l'Est, la situation s'est détériorée davantage depuis la résurgence des rebelles du M23 soutenus par Kigali. Depuis 2021, plusieurs pans de la province du Nord-Kivu sont sous le contrôle de ces rebelles. Ils veulent un dialogue direct avec Kinshasa, un schéma que rejette l'administration Tshisekedi voulant dialoguer directement avec Kagame qu'elle considère comme parrain du M23

Clément MUAMBA