Bien connue de la sphère politique et journalistique congolaise, Colette Braeckman est une figure familière qui a vécu plusieurs tournants de l’histoire de la RDC. Belge, âgée de plus de 70 ans, elle a mené sa carrière journalistique avec brio pour le journal Le Soir, couvrant le Congo dès les années 1980.
La fin du régime Mobutu, le début des guerres à l’Est du Zaïre devenu la RDC, les conflits successifs, les drames humanitaires, la période de 1+4, les premières élections jusqu’à la passation pacifique du pouvoir en 2019 et bien d’autres sujets ont été scrutés par sa plume avisée, faisant d’elle un témoin privilégié. Elle a réussi à obtenir des entretiens avec des personnalités clés de l’actualité du pays à divers moments.
Dans ce livre captivant, Colette Braeckman ne se contente pas de relater ses aventures de journaliste et ses reportages déjà publics et connus du grand public. « Avec elle, on bondit dans l’avion, on mange la poussière sur les pistes congolaises, on risque sa vie pour un bon article ». L’autrice, qui a déjà publié une dizaine d’ouvrages inspirés des guerres et drames de l’Afrique centrale, plonge les lecteurs dans les coulisses de ses reportages renommés.
« Ce sont des souvenirs. Il y a des reportages officiels connus et publiés dans le journal Le Soir, et à l’envers, ce sont des anecdotes, des réflexions, tout ce qui n’est pas écrit. Ce sont les coulisses », a expliqué Colette Braeckman lors de la présentation à Wallonie-Bruxelles à Kinshasa.
À Olivier Weyrich, l’éditeur du livre, d’ajouter :
« Ce qui m’a frappé, c’est ce moment de sincérité avec le Président Kabila père où elle a voulu percer la carapace en quelque sorte. Elle a eu du mal à réaliser l’interview et puis soudain, très tôt le matin, ils se mettent à parler longuement ensemble et on reçoit un témoignage de première main, cette partie est très intéressante ».
Dans le livre « Mes carnets noirs », on comprend le travail de Colette Braeckman, son cheminement, sa découverte du Congo, il montre comment une femme de terrain s’est faufilée, est allée à la découverte des choses pour raconter les réalités du pays. À travers ce livre, on perçoit tout son engagement personnel pour comprendre le Congo et en parler.
Le mot noir dans le titre du livre n’a cependant aucune signification particulière selon l’autrice. « Ce n’est que la couverture des carnets dans lesquels je devais écrire », précise la journaliste. Pour l’éditeur, qui publie des livres sur le Congo depuis plus de 15 ans en Belgique, c’est un ouvrage important et symbolique, témoignant de la manière dont une grande reporter a vécu ses 20 ou 30 ans à la découverte du Congo, au contact des grands acteurs du pays. Le livre est paru il y a 3 mois en Belgique.
Lors de la présentation de son livre à Kinshasa, ce mercredi 6 mars, Colette Braeckman a évoqué la partie est de la RDC où elle a récemment réalisé un reportage. Elle a visité un camp de déplacés et affirme que c’est le même tableau qu’à Gaza « sauf qu’ici, il y a très peu de presse internationale », dit-elle. L’ignorance de cette guerre par la presse et la communauté internationale la révolte.
« Cette guerre est ignorée parce qu’il y a d’autres sujets tels que l’Ukraine et Gaza. Ça me révolte toujours que le Congo passe après. C’est plus difficile à expliquer, mais je me dis qu’il y a deux poids, deux mesures et c’est pour ça que j’ai écrit de nombreux articles, des livres sur le Congo, pour essayer de contrebalancer cela », a déclaré Colette Braeckman.
Et d'ajouter :
"Je me suis dit qu'il y aurait presque une suite à écrire dans mon livre, c'est l'horreur de cette guerre qui se déroule dans le Nord-Kivu et qui est ignorée par la grande presse internationale."
Kuzamba Mbuangu