Journée internationale de sensibilisation à l'albinisme : le festival fièrement Ndundu célèbre avec des albinos à Kinshasa

Albinos
Photo ACTUALITE.CD

Depuis 2014, la journée du 13 juin est consacrée à la sensibilisation à l’albinisme. Parfois victimes de discrimination ou autre forme de marginalisation dans la société, les personnes atteintes d’albinisme s’approprient cette lutte depuis près de 10 ans en vue d’inculquer aux restes qu’elles n’ont pas à subir une quelconque discrimination. A Kinshasa, dans le cadre de la sixième édition du festival fièrement ndundu, des personnes albinos ou pas, ont célébré ensemble à Wallonie-Bruxelles.

Dans une journée qui a connu une conférence scientifique sur l’albinisme et l’émulation des talents, des personnes vivant avec albinisme sont intervenues, d’autres ont fait des prestations de musique pour la cause.

« Ça me fait plaisir parce que nous avons vécu une jeunesse plutôt dure parce que les gens n’étaient pas suffisamment sensibilisés sur la question de l’albinisme, parce que l’information ne circulait pas, parce qu’on laissait circuler des mythes et légendes qui ont entraîné une éviction de certains, qui ont entraîné des stigmatisations. La journée de sensibilisation, ça tombe bien parce qu’on sait que ce n’est pas une sorcellerie, il n’y a aucune magie derrière, il n’y a aucune punition divine derrière. Aujourd’hui, je sens que les jeunes vivent mieux cette question d’albinisme, que nous l’avons vécue », a dit Dan Kabongo, personne vivant avec albinisme.

Il pense tout de même qu’il reste à faire dans certains milieux pour la cause des albinos.

« Dans les milieux reculés, il n’y a pas encore d’amélioration de la situation de discrimination des albinos. C’est la démarche à faire, de rentrer jusque dans ces milieux, de sensibiliser parce que c’est surtout là que vivent les victimes de ces discriminations. Il y en a qu’on tue, il y en a qu’on démembre. La situation n’est pas encore toute gagnée, mais on va dire que les premiers pas sont là et sont nettement visibles », ajoute-t-il.

Le thème de cette journée en cette année est “l'inclusion fait la force”. Il vise à assurer l'inclusion des voix des personnes atteintes d'albinisme dans tous les secteurs de la vie. Il souligne aussi l'importance de l'inclusion d'une diversité de groupes à la fois à l'intérieur et à l'extérieur de la communauté des personnes atteintes d'albinisme. Selon l’Organisation des Nations Unies, ce thème souligne plus précisément l'importance et les avantages d’inclure un large éventail de personnes atteintes d'albinisme dans les discussions liées à l'albinisme, y compris les jeunes, les femmes, les enfants, les personnes âgées et les personnes atteintes d'albinisme de toutes races et origines ethniques.

« Le plus grand défi pour moi, je pense c'est accepter qu’on est atteint d’albinisme et regarder la vie autrement. Il y a une robustesse mentale qu’il faut avoir pour affronter la vie, surtout dans des pays africains où il y a encore beaucoup de stigmatisation. Et actuellement, le combat se fait de plus en plus à Kinshasa, mais dans l’arrière-pays, il y a encore beaucoup à faire », renchérit Carel Mukenge, aussi atteint d’albinisme.

Médecin dermatologue, intervenante à la conférence, docteur Mira Mutombo a largement détaillé la question de l’albinisme. Elle a notamment relevé que ce sont des personnes qui ont tout ce que toutes les peaux possèdent comme protection excepté la mélanine, qui est la substance spécialisée dans la protection contre le soleil. Les albinos sont donc exposés à des maladies liées à l’exposition solaire, notamment des rougeurs qui mènent petit à petit vers le cancer de la peau, qui est leur plus grand danger.

« Pour se protéger, il faut que les albinos évitent le soleil. Mais comme on ne peut pas le faire, il y a des méthodes qu’on peut mettre en jeu pour être de moins en moins exposé. Ce qui amène la maladie, c’est la durée de l’exposition. Pour réduire le temps d’exposition au soleil, il faut éviter notamment les taxis motos, il faut plutôt prendre des voitures normales ; éviter des endroits de jeux ouverts, utiliser des crèmes solaires qui refluent les rayons de soleil. Seulement, il faut les utiliser tout le temps. Une fois toutes les deux heures », explique Mira Mutombo.

La dermatologue recommande par ailleurs aux non albinos, qui sont du reste majoritaires, de participer dans cette lutte contre les problèmes des albinos. Ce qu’ils peuvent faire, c’est avoir les informations pour les albinos et de les aider à se protéger tant que possible, du soleil notamment. Elle implique aussi une responsabilité à l’Etat qui peut prendre en charge, les moyens à dépenser pour la prise en charge des personnes vivant albinisme car cela coûte très cher une fois qu’un albinos développe les masses et elles sont difficiles à gérer.

L'albinisme est une maladie rare, non transmissible et héréditaire qui existe dans le monde entier, indépendamment de l'appartenance ethnique ou du genre. Dans presque tous les cas d'albinisme, les deux parents doivent être porteurs du gène pour le transmettre, même s'ils ne sont pas eux-mêmes atteints d'albinisme. L'albinisme est dû à une absence de pigmentation (mélamine) sur les cheveux, la peau et les yeux et il n'existe aucun remède à l'heure actuelle.

Selon des chiffres de l’ONU, en Europe et en Amérique du Nord, une personne sur 20 000 souffre de cette maladie. Les estimations oscillent entre 1 cas sur 5 000 et 1 cas sur 15 000 en Afrique subsaharienne, où cette condition est plus répandue. On ne dispose cependant que de peu de données relatives à la prévalence de l’albinisme par pays.

Le manque de mélanine signifie que les personnes atteintes d'albinisme sont extrêmement vulnérables au cancer de la peau. Dans certains pays, la majorité des personnes atteintes d'albinisme décèdent d'un cancer de la peau entre 30 et 40 ans. Le cancer de la peau est hautement évitable lorsque les personnes atteintes d'albinisme peuvent exercer pleinement leur droit à la santé. Cela comprend l'accès à des contrôles de santé réguliers, à un écran solaire, à des lunettes de soleil et à des vêtements de protection contre le soleil. Dans un grand nombre de pays, ces moyens ne leur sont pas disponibles ou leur sont inaccessibles.

Emmanuel Kuzamba