La question relative au déploiement de la force régionale (EAC) dans la partie Est de la République Démocratique du Congo plus précisément au Nord-Kivu ne cesse de susciter des réactions dans l'environnement sociopolitique congolais. Si du côté du gouvernement l'on s'en tient à son déploiement conformément aux résolutions du mini sommet de Luanda, plusieurs acteurs socio politiques estiment que ce déploiement consacre la balkanisation de la RDC et démontre l'irresponsabilité du gouvernement face à la crise sécuritaire du pays.
Le député national Lubaya Claudel André demande au gouvernement de dénoncer sans détour les conclusions de la réunion des Chefs des armées EAC et d’imposer sans atermoiements à ses partenaires de l'EAC, le strict respect de l'intégrité territoriale et de la souveraineté. Pour l'élu de Kananga (Kasaï Central), mettre hors du théâtre des opérations les FARDC, l’armée nationale, au profit des forces étrangères serait un acte grave qu’aucune loi du pays n’autorise au gouvernement de cautionner.
"Je rappelle enfin au Gouvernement que conformément aux dispositions de l'article 187, alinéa 2 de la Constitution, seules les FARDC ont la mission de défendre l'intégrité du territoire national et les frontières de la RDC et que tout engagement tendant à leur priver d'exercer leur mission constitutionnelle sur une partie du territoire national ne peut que constituer une haute trahison, surtout lorsque l'on sait, aux dires du Gouvernement, que les FARDC "sont en train de monter en puissance". Dès lors, les mettre hors du théâtre des opérations au profit des forces étrangères sans mandat adossé par le Conseil de Sécurité de l'ONU serait un acte grave qu'aucune loi de la République n'autorise au gouvernement de cautionner", a-t-il fait savoir dans un communiqué ce mercredi 15 février 2023.
Et d'interpeller :
"Pour apaiser les doutes et dissiper tout malentendu, il revient au gouvernement de dénoncer sans détour les conclusions de la réunion susvisée et d'imposer sans atermoiements à ses partenaires de l'EAC, le strict respect de l'intégrité territoriale et la souveraineté de la RDC. Au cas contraire, il lui reviendra d'en tirer toutes les conséquences au nom du souverain primaire en se désengageant définitivement de l'AEC dont les ambitions à peine voilées des pays membres menacent gravement l'intégrité territoriale et la souveraineté de notre pays".
À l'en croire, comme à Berlin en 1885, le Burundi, le Kenya, l'Ouganda et le Sud Soudan, chacun a eu sa part du gâteau pour en disposer pleinement et ce, comme suit:
"Sake, Kirolirwe et Kitshanga (Burundi), Kibumba, Rumangabo, Tongo, Bwiza et Kisheshe (Kenya), Rumangabo (Soudan du Sud) et coopérera avec l'armée kényane et enfin, Bunagana, Kiwanja/Rutshuru et Mabenga (Ouganda). De ce fait, sauf reddition tacite des FARDC, le pays n'est plus entier. Son territoire est morcelé, son intégrité rétrécie et sa souveraineté rognée", a-t-il dénoncé dans son communiqué.
Pour sa part, a-t-il rappelé, s'adressant par visio-conférence aux représentants des groupes rebelles réunis à Nairobi le 29 Avril de la même année, le Président Félix Tshisekedi qui, sur pied de l'article 74 de la Constitution a fait serment de maintenir l'indépendance du pays et l'intégrité de son territoire déclarait de manière sibylline: "Ça ne sert à rien de vous battre pour des morceaux de terre alors que c'est la Communauté des États d'Afrique de l'Est qui deviendra notre pays...".
"Ce plan serait-il en train de se réaliser ?" s'est-il interrogé avant de fustiger la politique du gouvernement sur la situation sécuritaire : " Lorsque l'on sait que la province du Nord Kivu est sous état de siège depuis le 06 Mai 2021, que dans le cadre de la mutualisation des forces, les FARDC et l'UPDF (armée ougandaise) sont censées y mener des opérations militaires conjointes et que la Force régionale (elle coûte 100 Millions de dollars en 6 mois !) a pris en décembre 2022 le contrôle de Kibumba et plusieurs autres localités lui "cédées" de "bonne foi" par le M23, il devient difficile d'adhérer à la thèse gouvernementale, malgré toutes les explications qu'il s'efforce de fournir sans rassurer, au vu de la réalité sur terrain".
Quelques jours après le sommet de Bujumbura, les chefs d’état-major de l’EAC s’étaient donné rendez-vous à Nairobi alors que les combats entre l’armée congolaise et le M23 se poursuivent, pour tenter de donner un second souffle à la force régionale.
Le « cessez-le-feu immédiat » décidé le 4 février à Bujumbura lors du sommet extraordinaire de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) n’aura été qu’une vaine promesse. Les affrontements entre l’armée congolaise (FARDC) et les rebelles du M23 ont repris dans la foulée de la rencontre convoquée par Évariste Ndayishimiye. Les combats continuent de provoquer d’importants déplacements de population en territoire de Masisi, où se concentrent les combats depuis plusieurs semaines.
Dans leur rapport consulté par nos confrères de Jeune Afrique, les militaires de l’EAC se sont donc accordés sur un nouveau calendrier de retrait des rebelles. Ce troisième chronogramme s’étend cette fois sur trente jours, à partir du 28 février. Il doit se dérouler en trois phases. Selon le document, le M23 a jusqu’au 10 mars pour se retirer de Karenga, Kilolirwe, Kitchanga, Kibumba et Rumangabo. Le 20 mars, les rebelles doivent avoir quitté Kishishe, Bambo, Kazaroho, Tongo et Mabenga. Le retrait doit en théorie prendre fin le 30 mars, avec le départ de Rutshuru, Kiwanja et Bunagana, première localité passée sous contrôle du M23, en juin 2022
Clément MUAMBA