RDC-Ituri : 21 personnes condamnées à la prison à perpétuité et 13 acquittées  dans l'affaire dite Djugu 2

La composition lors de l’audience foraine du 1er Avril 2021

Le Tribunal militaire de garnison de l'ITURI a rendu son verdict le 01er avril 2021  dans l'affaire dite Djugu 2 mettant en cause l’auditeur militaire de garnison et 219 victimes constituées partie civile contre 32 prévenus membres du groupe armé Coopérative pour le Développement du Congo « CODECO » et l’Etat congolais, civilement responsable.

 Sur les 32 prévenus, 21 ont été reconnus coupables de crimes contre l’humanité par meurtre, incendie, destruction, pillage et persécution et condamnés à la prison à perpétuité. Les 11 autres prévenus ont été acquittés par le Tribunal faute de preuves des accusations portées à leur charge.

Le verdict a été salué du côté des avocats de la partie civile. Maître Viviane KABARO, l’une des avocates de la partie civile dans cette affaire, a exprimé toute sa satisfaction pour ce verdict," Une avancé dans la lutte contre l'impunité en ITURI " a-t-elle dit.

Les avocats de la défense quant à eux sont satisfaits de l’acquittement de 11 de leurs clients faute de preuves de  leur culpabilité. Acquittement qui n'a pas laissée indifférent un avocat de la défense : «le Tribunal militaire de garnison de l'ITURI a pleinement joué son rôle d'église au milieu du village en confrontant les faits au droit» a indiqué maitre Immaculé LUNDEY.

Le Tribunal a également condamné les 21 prévenus en solidarité avec l’Etat congolais au payement des dommages-intérêts aux 219 victimes.

Le Tribunal a ordonné l’indemnisation de chacune des victimes selon l’évaluation des préjudices qu’elles ont subi (30.000 USD pour chacune des victimes d’incendie, 10.000 USD pour chacune des victimes de meurtre, 15.000 USD pour chacune des victimes de pillage et persécution) ce, à titre de réparation individuelle.

A titre de réparation collective, le Tribunal  a condamné la RDC à l’érection d’un centre de santé dans chaque village pour assurer la prise en charge psycho-médicale des victimes, à la recherche des cadavres non-retrouvés, à la mise à la disposition des victimes des moyens nécessaires afin d’organiser les funérailles et à l’érection d’un monument dans chaque village attaqué.

Maître Viviane KABARO a  précisé que la République Démocratique du Congo a encore été condamnée pour n'avoir pas pris préalablement toutes les mesures nécessaires pour mettre fin à la prolifération des groupes armés,   plus précisément la CODECO qui commettent des crimes sur son territoire.

Interviewer à cet effet, un autre avocat de la défense a indiqué que la République Démocratique du Congo a été reconnue civilement responsable pour avoir failli à sa mission de protection de sa population.

Le chemin vers des réparations effectives reste encore long pour les victimes

Ce verdict est une étape vers la réparation en faveur des victimes certes, mais il reste du chemin à parcourir.

Les victimes ont reçues cette décision comme un signal d’espoir pour leur sortir des conditions déplorables dans lesquelles elles vivent.

Cependant, avant qu’elles rentrent réellement dans leurs droits, il faut que le jugement devienne définitif ce, après l’épuisement des voies de recours ou l’expiration des délais de recours et par la suite entamer la procédure administrative d’exécution de jugement souvent marqué par une multitude de démarches à entreprendre et de fonds à mobiliser.

L’ONG Internationale  Avocats Sans Frontière qui a appuyé la partie civile, dans son communiqué du 08 Avril 2021 a précisé que : « Les victimes n’obtiennent que très rarement les dommages et intérêts auxquels elles ont droit. La procédure d’exécution d’autres formes de réparations est ainsi loin d’être claire. A ce stade, il s’agit de s’assurer que :

- L’indigence des victimes soit reconnue et que celles-ci soient exonérées des frais liés à la mise en état du dossier et à la procédure d’exécution ;

-  Les autorités administratives et judiciaires procèdent à la mise en état du jugement pour le rendre exécutoire ;

- Les autorités administratives et judiciaires procèdent à l’exécution effective du jugement ;

-  Les victimes reçoivent effectivement et dans les meilleurs délais les réparations auxquelles elles ont droit. »

Les faits

Rappelons également que ce procès a visé particulièrement les crimes commis entre décembre 2017 et mars 2020 par le groupe armé" Coopérative pour le Développement du Congo (CODECO) contre la population civile des villages Irumu et Tchomia en territoire de Djugu. A la suite de ces attaques, au moins 800 personnes ont été tuées, 200000 ont été forcée de se déplacer et plus de 400 maisons détruites.

Débuté le 01 Mars 2021, ce procès s'est clôturé le 01 avril 2021 lors de l’audience foraine du verdict tenue à Iga, chefferie de Barema-Baguru, Territoire de Djugu dans la Province de l'Ituri.

Article rédigé avec l’appui de RCN Justice et Démocratie dans le cadre du projet « soutenir les efforts de la lutte contre l’impunité en RDC ».

Ginette Usimesa