RDC-Beni: frustrés, les médecins demandent à Tshisekedi le port d’armes pour leur sécurité dans des zones rouges

Les médecins de Beni
Manifestation des médecins de Beni

En province du Nord-Kivu, les médecins de Beni ont recommandé au chef de l’Etat de leur doter des armes pour qu’ils se prennent en charge dans leurs structures sanitaires localisées dans les zones insécurisées où opèrent les groupes armés dont les combattants d’Allied Democratic Forces (ADF), auteurs des milliers de morts des civils dans la zone depuis huit ans.

Ils ont exprimé ce vœu à travers une marche organisée lundi 24 octobre sur le boulevard Nyamwisi. Au cours de cette manifestation, ils ont exprimé leur mécontentement face aux massacres qui ne cessent pas dans la zone et dont leur collègue a été victime le jeudi dernier dans une attaque à Maboya.

Au moins une cinquantaine de médecins ont pris part à cette marche qui est partie du rond-point ENRA jusqu’à la mairie de Beni où un mémorandum a été déposé au maire de Beni. Les manifestants étaient habillés en blouse blanche et munis d’un calicot arboré avec l’image de leur consœur tuée.

« Des alertes ont souvent été données pour prévenir plusieurs attaques mais rien n’a été fait pour que le pire ne se réalise à Maboya. Au vu de la situation qui salisse, excellence monsieur le président de la République, les médecins de Beni ville et territoire vous recommandent la sécurisation de toutes les structures de santé sans condition aucune et les autoriser le port d’armes pour la protection individuelle dans les zones rouges pendant les heures de garde », déclarent-ils dans un mémorandum lu par Godefroid Kombi, secrétaire permanent du Syndicat national des médecins (Synamed/Beni).

En réaction, l’armée note qu’aucune loi du pays ne permet à la population de détenir les armes. Pour le capitaine Anthony Mualushayi, qui dit comprendre la frustration des médecins à Beni, armer ces professionnels de santé, c’est équiper indirectement les assaillants qui écument la zone. 

« On comprend le sentiment qui anime les médecins, c’est d’abord la colère et la perte du docteur Sylvie. Mais aucune loi du pays ne permet à la population de détenir des armes. Donc, on ne peut pas armer les médecins des armes de guerre parce que d’abord ils n’ont pas suivi de formation militaire et leur métier n’est pas parenté au para-militaire. Doter à cette catégorie de la population des armes de guerre c’est doter indirectement des armes à l’ennemi. Devant l’attaque des assaillants je pense que les médecins jetteront tout simplement cette arme et l’ennemi récupérera ça pour encore nous faire très mal », réplique le capitaine Anthony Mualushayi. 

Et d’ajouter : 

« Ce qu’ils peuvent demander, c’est qu’on renforce par exemple les dispositifs sécuritaires aux alentours des hôpitaux pour les protéger et qu’on se mette ensemble avec les services de sécurité et qu’on trouve les mécanismes pour protéger les malades et les structures sanitaires et aussi les médecins ». 

La marche ne consistait pas seulement à demander le port d'armes par les médecins. C’était surtout aussi une occasion d’annoncer leur mouvement de grève qui va débuter ce lundi et dont la durée est de trois jours.

Pendant 72 heures, les médecins de Beni ville et territoire ne seront pas visibles dans différentes structures sanitaires parce que leur consœur Dr Sylivie Kavuke a été calcinée lors  d’une attaque attribuée aux rebelles ADF jeudi dernier à Maboya. Les assaillants avaient pillé de fond en comble les médicaments du centre de santé de Maboya, la plus grande structure sanitaire de la place puis l’incendier. Une autre structure sanitaire était attaquée et six autres personnes tuées à la machette et par balles.

Yassin Kombi