Domaine Liyolo : là où règne le culte de la création !

Impossible de se perdre ou de se tromper d’adresse pour arriver sur place. Même les moins intéressés connaissent Liyolo, du moins le nom de l’arrêt de bus éponyme, situé sur la route nationale numéro 1, avenue By pass, à proximité de l’arrêt Habitat d’un côté et Terrasse de l’autre. Une vaste concession qui respire encore l’inconnu pour le grand public.

Clôture, arbres, œuvres d’art qu’on aperçoit dès le premier pas dans le domaine Liyolo inspirent. Le voyage artistique commence et le culte de la création est lancé. Tout est art, tout rappelle à une conscience artistique qui a fait d’Alfred Liyolo le grand nom qui résonne encore en RDC et dans le monde. La journée portes ouvertes organisée ce samedi 13 avril a été une opportunité de visiter ce sanctuaire de l’art.

La Fondation Liyolo pour l’excellence artistique a ouvert cette résidence pour la première fois au grand public. Sans frais, toutes les catégories de la population étaient appelées à venir contempler l’art sous toutes les formes utilisées par Maître Liyolo. C’était sans compter sur le désir du public de découvrir le mythe caché derrière les murs d’une icône de l’art dont les œuvres sont très éloquentes et qu’on ne pourrait s’empêcher de visiter à tout prix.

Le lieu a été investi par une foule au point que l’espace n’a pu la contenir. On dirait que le temps s’arrêtait à cet endroit précis ce jour-là. En conséquence, tout le monde n’a pas pu faire la visite tant voulue. Autorités, curieux, amoureux de l’art, journalistes et bien d’autres couches de la population étaient sur place. La fondation a donc décidé d’élargir, pour un temps, les visites tous les week-ends afin de permettre à un plus grand nombre de passer sur les lieux.

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La jeunesse artistique s’inspire

5 ans après avoir tiré sa révérence, l’œuvre d’Alfred Liyolo déchaîne toujours les passions. Le maître du bronze demeure une source d’inspiration même pour les plus jeunes qui ne l’ont connu que de réputation.

« Je suis contente d’avoir pu visiter le lieu et d’avoir appris sur l’historique de maître Liyolo à travers ses œuvres racontées par ses enfants. Liyolo était un grand visionnaire qui a beaucoup contribué et participé au développement culturel de notre pays. Il avait pour vision de développer même la vie artistique sur la scène kinoise, c’est une vision que même en tant qu’artiste, nous allons veiller dessus », a dit Maïté Botembe Moseka, étudiante à l’académie des beaux-arts.

Dans l’après-midi, plusieurs autres activités artistiques étaient au programme pour rendre hommage à Alfred Liyolo. Parmi elles, la fabrication des marionnettes avec les enfants, une prestation théâtrale et la projection de quatre films dont un sur la vie de Liyolo.

Un des comédiens de la pièce, Aaron Lunkamba, étudiant à l'Institut National des Arts, se dit inspiré de mieux faire son travail dans cet art de la scène.

« Il s’agissait de rendre hommage à Maître Liyolo dans tous les arts. C’est un grand plaisir d’avoir joué sur cette scène. Je me dis à présent qu’en tant qu’artiste, il faut bien faire le travail et laisser des traces », dit-il.

Le film documentaire sur la vie de Liyolo est un court métrage réalisé par Loridon Kabasele. Il s’intitule L’immortel Liyolo. Un documentaire vrai, parti d’une idée d’un reportage. Il a été enrichi d’un mini parcours d’Alfred Liyolo depuis sa naissance et ses réalisations dans une voix off. Le moment le plus intense est celui du deuil, le réalisateur a capté différentes images lors des cérémonies de derniers hommages.

Tout au long du film, les membres de la famille Liyolo dont ses filles et bien d’autres personnes témoignent de sa générosité et de son incroyable talent. Un film que la famille Liyolo ne voulait pas voir au départ à cause de l’émotion qu’elle dégageait. C’était même la première fois qu’il était présenté au public.

Loridon Kabasele n’a pas côtoyé Liyolo de son vivant mais l’a connu à travers son œuvre. Il témoigne de sa grandeur.

« Je l’ai connu à travers ses œuvres. Quand je n’avais pas de connaissances sur la philosophie de l’art, je ne comprenais pas les œuvres de Liyolo. Quand on m’a présenté son atelier, j’ai commencé à faire son film, on m’a expliqué des choses, c’est là que j’ai compris le côté fort de ce monsieur. C’était vraiment un grand homme. Tous ceux qui viennent de nulle part et qui arrivent quelque part m’inspirent », explique-t-il.

Liyolo ou le génie du bronze

Le nom d’Alfred Liyolo résonne encore dans le paysage artistique congolais à ce jour. Quoique cinq ans se soient écoulés depuis sa disparition, le 1er avril 2019. Cinq années de regrets, de souvenirs, d’hommages, cinq années à penser à l’œuvre d’un talentueux sculpteur congolais qui a marqué son époque en bronze et influencé les générations. Professeur émérite, homme de culture, homme du monde, Alfred Liyolo était connu affectueusement sous le nom de Maître Liyolo.

Parmi les activités en hommage à cette figure emblématique de l’art, il y a eu, en mai et juin 2021, une exposition dénommée “Liyolo Empreinte”, organisée par la fondation éponyme. C’était en mémoire de ses 60 ans de carrière. Liyolo Empreinte, c’était Liyolo qui est venu en tant qu’avant-gardiste dans les années 60, début 70 et qui a ouvert des portes, le chemin pour tant d’autres artistes. Il a osé, a été audacieux, ce qui permet aujourd’hui que les artistes congolais soient mieux vendus à l’étranger.

Liyolo est l'auteur d'innombrables œuvres monumentales à travers la RDC dont certaines occupent plusieurs espaces publics, comme la place des artistes au rond-point Victoire ou encore le monument en hommage aux mamans maraîchères, au croisement des avenues Kimwenza et By Pass à Kinshasa. Des œuvres récentes peuvent être vues dans le jardin de la Primature à Kinshasa.

Autres œuvres réalisées par Alfred Liyolo, c’est la statue de Franco Luambo Makiadi avec sa guitare, qui demeure au rond-point Victoire à Kinshasa. Toujours avec le bronze qu’il avait pratiquement dompté, il a réalisé La penseuse, en 1976, ce que le Président Sénégalais disait être l'authenticité de la Négritude. Cette statue a été classée dans la catégorie des œuvres intemporelles au ministère de la culture, arts et patrimoine, le 30 mars dernier.

Kuzamba Mbuangu